Droits des occupants en cas de démolition du logement
Démolition d'un logement HLM
En cas d'autorisation de démolir spécifique délivré par le Préfet (CCH : L.443-15-1) ou lorsque la démolition est prévue dans une convention ANRU, le locataire qui refuse trois offres de relogement répondant aux critères légaux perd son droit au maintien dans les lieux.
La mise en oeuvre d'une opération de démolition d'un logement HLM et les conséquences qui y sont attachées en matière de protection des occupants sont les même qu'il s'agisse d'un logement conventionné ou non conventionné (CCH : L.442-6 ; CCH : L.353-15).
Concertation préalable avec les occupants
Une concertation est obligatoire "avant toute décision d’engager une opération de construction-démolition" (loi du 23.12.86 : art. 44 quater). Menée par le bailleur avec les représentants des locataires, la concertation porte sur la nature des travaux, les modalités de leur réalisation et sur les conditions de relogement des locataires. Elle donne ensuite lieu à un bilan tenu à disposition des locataires.
En cas d’opération d’aménagement, c’est une autre concertation qui s’impose, régie par le code de l’urbanisme (CU : L.300-2), dont l’initiative revient à la collectivité locale.
Bénéficiaires du droit au maintien dans les lieux
Pour bénéficier du droit au maintien dans les lieux dans un logement HLM, le locataire doit (loi du 1.9.48 : art. 10) :
- être de bonne foi, c'est-à-dire occuper le logement en vertu d’un titre locatif régulier ; remplir toutes ses obligations locatives, notamment payer régulièrement son loyer et ses charges ;
- occuper effectivement et de façon continue son logement (au moins huit mois par an, sauf si sa profession l’oblige à l’occuper moins longtemps), à titre de résidence principale et de manière suffisante. L’occupation suffisante est appréciée, compte tenu des personnes de la famille du locataire à sa charge (conjoint, ascendants, descendants).
Est insuffisamment occupé un local dont le nombre de pièces habitables est supérieur de plus de deux aux personnes qui y ont leur résidence principale (Cass. Civ III : 1.2.03).
Le droit au maintien dans les lieux ne peut être invoqué par les personnes :
- occupantes sans titre ;
- logées à titre gratuit, sauf dans les cas particuliers prévus par la loi (cf. § transfert du droit au maintien dans les lieux) ;
- qui ont plusieurs habitations à moins qu’elles ne justifient que leur fonction ou leur profession les y oblige ;
- dont le titre d’occupation est l’accessoire d’un contrat de travail ;
qui ont à leur disposition ou peuvent recouvrer, en exerçant leur droit de reprise, un autre local répondant à leurs besoins ; - qui occupent les locaux dans les immeubles acquis ou expropriés à la suite d’une déclaration d’utilité publique, à charge pour l’administration d’assurer le relogement des locataires ou occupants expulsés ;
- qui occupent des locaux insalubres (Code de la santé publique : L.131-22) ou des locaux ayant fait l’objet, soit d’une interdiction d’habiter, soit d’un arrêté de péril.
Enfin, le droit au maintien dans les lieux n’est pas applicable aux personnes morales occupant des locaux à usage professionnel ou exerçant une activité désintéressée.
Transfert du droit au maintien dans les lieux (loi du 1.9.48 : art. 5)
En cas d’abandon du domicile ou de décès du locataire, le contrat de location est résilié de plein droit même en l’absence de délivrance d’un congé au locataire.
Toutefois, le droit au maintien dans les lieux est transféré :
- au conjoint ou au partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ;
- aux enfants mineurs jusqu’à leur majorité ;
- aux ascendants et aux personnes handicapées vivant de façon effective avec le locataire ou l’occupant depuis plus d'un an.
Le maintien dans les lieux reste acquis aux personnes qui en ont bénéficié antérieurement au 24 décembre 1986.
En cas de divorce ou de séparation de corps, le droit au maintien dans les lieux est accordé par le tribunal à l’un ou l’autre des époux en considération des intérêts sociaux ou familiaux.
Enfin, le droit au maintien dans les lieux ne peut être opposé au bailleur qui a obtenu du Préfet l'autorisation de démolir (CCH : L.443-15-1).
Conditions légales du relogement (CCH : L.353-15 et L.442-6)
Les conditions de relogement des locataires HLM s’appliquent que la démolition s’inscrive ou non dans une opération d’aménagement (sur les obligations de relogement propres à une opération d’aménagement : cf. Démolition dans le cadre d'une opération d'aménagement).
Quelles que soient les financements obtenus pour réaliser l’opération de démolition, le relogement doit être assuré dans des conditions légales (loi du 1.9.48 : art. 13 bis).
Le local mis à la disposition des personnes évincées doit être en bon état d'habitation, remplir les conditions d'hygiène normales et correspondre à leurs besoins personnels ou familiaux et, le cas échéant, professionnels, et à leurs possibilités.
Il n’y pas de jurisprudence récente sur l’application de ces critères. Si l’on se réfère néanmoins aux décisions rendues sous l’empire de la loi du 1.9.48 dans le cadre du parc locatif privé, il semble que pour l’appréciation des besoins du locataire, il doit être tenu compte de ses possibilités financières (Cass. Civ : 8.11.77), le local offert ne doit pas avoir obligatoirement les mêmes caractéristiques que le précédent logement (CA de Paris : 2.7.82). Enfin, la Cour de cassation a estimé dans une affaire concernant le parc locatif privé soumis à la loi de 48 qu’aucune disposition légale n’exige que le local offert présente une garantie de droit au maintien dans les lieux (Cass. Civ III : 24.4.81).
Le logement offert doit en outre être situé :
- dans le même arrondissement ou les arrondissements limitrophes ou les communes limitrophes de l'arrondissement où se trouve le local, objet de la reprise, si celui-ci est situé dans une commune divisée en arrondissements ;
- dans le même canton ou dans les cantons limitrophes de ce canton inclus dans la même commune ou dans les communes limitrophes de ce canton si la commune est divisée en cantons ;
- dans les autres cas sur le territoire de la même commune ou d'une commune limitrophe, sans pouvoir être éloigné de plus de 5 km.
Trois offres de relogement correspondant aux critères de forme et de fond posés par l’article 13 bis sont nécessaires pour remplir les obligations légales. En cas de refus du locataire, celui-ci doit partir sans autre dédommagement possible. A défaut, une procédure d’expulsion pourra être mise en œuvre. Le droit au maintien dans les lieux est remis en cause à l'expiration d'un délai de 6 mois à compter de la notification de la troisième offre de relogement refusée (loi MLLE : art. 61-1 et CCH : L.442-6 et L.353-15). Toutefois, cette condition n'est pas exigée du bailleur qui démontre qu'un logement respectant les conditions du même article 13 bis de la loi de 1948 a été spécialement conçu pour le relogement du locataire.
Le congé doit être délivré avec la troisième offre de relogement, déclenchant un délai de six mois au terme duquel le locataire est "déchu de tout titre d’occupation des locaux loués".
La loi n’impose pas un formalisme plus précis pour ce congé, il est néanmoins indispensable de disposer des preuves de sa délivrance en procédant à son envoi par lettre recommandée avec avis de réception ou à sa remise par huissier ou contre émargement sans oublier de délivrer ce congé à chacun des conjoints ou partenaires d’un PACS.
Les locaux ainsi rendus disponibles ne peuvent être réoccupés avant le début des travaux.
Convention de relogement (loi 1.9.48 : art. 13 quater)
Une convention de relogement conclue dans le cadre de la loi, entre le locataire et le bailleur, peut fixer les conditions du relogement. La loi précise que toute convention entre le bailleur et le locataire pour la mise en œuvre ne peut être signée, à peine de nullité, qu'après l'expiration d'un délai de trente jours suivant la réception de la demande (loi 1.9.48 : art. 13 quater).
Le projet de convention est adressé au locataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
A peine de nullité de la convention, ce projet ainsi que la convention ultérieurement signée doivent reproduire l'un et l'autre en caractères très apparents les dispositions de l’article 13 quater. L'avis de réception du projet de convention doit, également à peine de nullité de la convention, lui être annexé.