Succession : prise en compte du pacte tontinier dans le calcul du partage
Cass. Civ I : 12.1.22
N° 20-12.232
Un pacte tontinier peut constituer une donation déguisée en l’absence d’aléa à la date de sa conclusion.
En l’espèce, un couple avait acquis un appartement pour lequel avait été conclu un pacte tontinier. Des difficultés sont survenues lors des opérations de partage de la succession au décès de l’époux.
Les enfants du défunt, issus d’un précédent mariage, ont soulevé que l’achat de l’appartement constituait une donation déguisée. Le bien avait été acquis deux mois avant le décès de l’époux, atteint d’une grave maladie mettant en jeu son pronostic vital à court terme.
Pour mémoire, la tontine est une clause insérée dans un contrat de vente permettant qu’au décès de l’un des acquéreurs, sa part du bien acheté revienne automatiquement au survivant, sans que les héritiers du défunt ne puissent avoir de droit sur cette part. Le principe même de cette clause est son caractère aléatoire, tenant à l’ordre de décès des acquéreurs. Par ailleurs, le rapport successoral permet d’intégrer les donations dans l’ensemble de l’actif successoral. Ce rapport permet de déterminer la masse partageable due par l’héritier aux co-héritiers (CC : art. 843).
Les juges du fond ont requalifié le pacte tontinier en donation déguisée, en faveur de l’épouse, soumise au rapport successoral. Comme toute libéralité, cette donation était présumée avoir été faite à titre d’avance sur la part successorale.
La Cour de cassation rappelle que les libéralités reçues par le conjoint survivant s’imputent sur les droits de celui-ci dans la succession (CC : art. 758-6). Le pacte tontinier, qui constitue une donation déguisée, sera donc soumis au rapport successoral et ainsi pris en compte dans le calcul du partage. La Cour de cassation avait eu un raisonnement identique concernant un pacte tontinier requalifié en donation déguisée en raison de l’importante différence d’âge et d’état de santé des concubins (Cass. Civ I : 10.5.07, n° 05-21.011).