Meublés touristiques : obligation de transmission des données
Cass. Civ III : 26.1.22 / CJUE : 27.4.22, C-674/20
N° 21-40.026 et 62020CJ0674
Deux arrêts ont été rendus concernant la transmission des données, obligatoire dans certaines communes, en matière de location saisonnière.
La Cour de cassation relève dans un premier arrêt que l’amende civile prévue en cas de non-transmission à la commune des données relatives aux périodes de location ne méconnait ni le principe de légalité des délits et des peines, ni la présomption d’innocence, ni le droit de se taire.
Pour mémoire, les communes où le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation est encadré, peuvent décider de soumettre à une déclaration préalable la location d’un meublé de tourisme (Code du tourisme : L.324-1-1). La déclaration indique si le meublé de tourisme constitue la résidence principale du loueur. La commune peut également demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours de mise en location l'année précédente. S’il ne s’exécute pas dans un délai d’un mois, ce dernier encourt une amende d’un montant maximum de 10 000 euros (Code du tourisme : L.324-1-1 V).
En l’espèce, une commune avait assigné des propriétaires de meublés touristiques à réaffecter à l’habitation le logement, ainsi que leur condamnation à plusieurs amendes civiles dont celle mentionnée ci-dessus.
Le tribunal judiciaire avait transmis une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC), pour savoir si l’obligation de transmettre le nombre de jours de mise en location méconnait le principe de légalité des délits et des peines, le droit à la présomption d'innocence et le droit de se taire, protégés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (art. 8 et 9).
Pour la Cour de cassation, la question posée ne présente pas un caractère sérieux :
- sur le principe de légalité des délits et des peines, elle précise que l'amende civile réprime un manquement défini de manière suffisamment claire et précise pour éviter tout arbitraire ;
- sur la présomption d’innocence, la délivrance de l’amende ne fait pas présumer de la commission d'un manquement à l'interdiction de louer un meublé de tourisme au-delà de 25 jours au cours d'une même année civile ;
- sur le droit de se taire : cette sanction ne tend pas à l'obtention d'un aveu, mais seulement à la présentation d'éléments nécessaires à la conduite d'une procédure de contrôle par la commune.
Elle décide de ne pas renvoyer la QPC au Conseil constitutionnel, comme elle l’avait déjà fait concernant l’amende encourue en cas de transformation illégale du logement et les obligations spécifiques supportées par les intermédiaires en matière de location touristique (Cass. Civ III : 5.7.18, n° 18-40.014 ; Cass. Civ. III : 31.1.19, n° 18-40.042 et n° 18.40.043).
Le second arrêt a été rendu par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Elle a précisé qu’une législation nationale obligeant les prestataires de services à transmettre à l’administration fiscale certaines données relatives aux transactions d’hébergement touristique n’est pas contraire au droit de l’Union.
En l’espèce, une plateforme électronique d’intermédiation immobilière soutenait que l’obligation de transmettre des informations sur les transactions touristiques effectuées à l’autorité fiscale régionale belge était susceptible d’entraver la libre circulation des services. En cas de non-transmission, les intermédiaires risquaient une amende. La plateforme réclamait donc l’annulation de cette obligation de communication. Elle considérait que la législation belge était discriminatoire.
La CJUE rappelle tout d’abord que la directive 2000/31 sur le commerce électronique prévoit expressément l’exclusion de la fiscalité de son champ d'application.
Elle précise ensuite que l’obligation de fournir certaines informations sur les transactions d’hébergement touristique concerne tous les prestataires de services d’intermédiation immobilière, indépendamment du lieu d’établissement de ces prestataires et indépendamment de leur mode de prestation desdits services. Selon la Cour, la législation belge n’est pas contraire à la libre prestation de services dans l’Union.