Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs
Cass. Civ I : 30.3.22
N° D1917996
Une demande tendant à voir réputer non écrite une clause abusive dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur n'est pas soumise à un délai de prescription.
En l’espèce, une banque a consenti à des particuliers plusieurs prêts immobiliers en devise étrangère (francs suisses), mais remboursables en euros. Les emprunteurs ont assigné la banque en invoquant notamment le caractère abusif de certaines clauses des contrats de prêt.
La Cour de cassation s’est prononcé une première fois sur cette affaire (Cass. Civ I : 16.5.18, n° 17-11337). Pour la Cour, il résultait du contrat que toute dépréciation de l'euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence d'augmenter le montant du capital restant dû et, ainsi, la durée d'amortissement du prêt d'un délai maximum de cinq ans. Par conséquent, il incombait à la Cour d’appel, à supposer que la clause litigieuse ne définisse pas l'objet principal du contrat ou qu'elle ne soit pas rédigée de façon claire et compréhensible, de rechercher d'office si le
risque de change ne pesait pas exclusivement sur l'emprunteur et si, en conséquence, cette clause n'avait pas pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur (C. conso : L.132-1).
Statuant sur renvoi après cassation, la Cour d’appel a considéré irrecevables les demandes de reconnaissance du caractère abusif de certaines clauses des contrats, en raison du délai de prescription de cinq ans applicable dans les relations entre commerçant et non-commerçant (Code de commerce : L.110-4).
Nouvellement saisie, la Cour de cassation censure cette position. Elle rappelle la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE : 10.6.21, n° C-776/19 à C-782/19) selon laquelle une demande introduite par un consommateur aux fins de constater le caractère abusif d'une clause figurant dans un contrat conclu avec un professionnel ne peut être soumise à aucun délai de prescription. Par conséquent, la demande tendant à voir réputer non écrite une clause abusive sur le fondement du Code de la consommation ne peut pas être soumise à la prescription quinquennale.