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Les opérations financées à l’aide d’un Pass-Foncier dans le Finistère

ANIL, extrait d'Habitat Actualité, juillet 2010


Le Pass-Foncier a eu un succès particulier dans l’ouest de la France, où de nombreuses collectivités, ayant très rapidement compris le parti qu’elles pouvaient en tirer, ont été parmi les premières à instituer des aides permettant sa mise en œuvre. Les critères d’attribution ont souvent été définis avec la collaboration des ADIL et les collectivités concernées ont, le plus souvent, incité les demandeurs à faire étudier leur projet par l’ADIL. Le conseil des ADIL est en effet, à leurs yeux, la meilleure garantie de la sécurisation des projets.
Ainsi, l’ADIL du Finistère a étudié en 2009 plus de 1 000 projets, dont les trois quarts concernaient la construction ou l’acquisition de logements neufs. L’exploitation des simulations financières, en permettant de comparer les opérations avec Pass-Foncier à celles n’en ayant pas bénéficié, fournit d’intéressantes indications sur l’impact de ce dispositif.
Sur 802 projets d’accession dans le neuf, 90% concernent la construction d’une maison, les 10% restants portant sur l’achat à un promoteur d’un logement individuel ou collectif. Dans près de quatre cas sur cinq, le plan de financement intègre un Pass-Foncier, bail à construction (41%) ou prêt (38%). Cette répartition montre le succès du dispositif, succès qui s’est traduit par une très forte augmentation du nombre de consultations dispensées par l’ADIL.
Cet engouement tient évidemment à la très forte solvabilisation qu’apporte le Pass-Foncier : il a sans aucun doute joué un effet déclencheur pour bon nombre de ménages. La comparaison des niveaux de vie (revenu par unité de consommation) l’indique sans ambiguïté : par rapport aux autres candidats à l’accession, le niveau de vie moyen des ménages pouvant bénéficier d’un Pass-Foncier est inférieur d’environ 150 €/mois pour la formule «prêt» et 320 €/mois pour la formule «bail à construction». L’écart est un peu plus élevé en zone B2 qu’en zone C.

Grâce au Pass-Foncier, la capacité de financement d’une bonne part des bénéficiaires devient supérieure à celle des ménages dont les revenus se situent peu au-dessus des plafonds de ressources. C’est ce que montre le montant moyen des opérations, nettement plus élevé pour les bénéficiaires de Pass-Foncier.

Pour effectuer la comparaison, on a redressé le montant des opérations avec Pass-Foncier en y réintégrant le différentiel de TVA. L’écart est de l’ordre de 37 000 € en zone B2 et 28 000 € en zone C. L’importance de cet écart suggère qu’une part des ménages, qui aurait pu accéder à la propriété sans Pass-Foncier, utilise l’aide qu’il véhicule pour financer des opérations d’un coût plus élevé, soit mieux situées (donc avec un foncier plus cher), soit de meilleure qualité ou de plus grande taille. Il est possible qu’une partie des bénéficiaires se serait, sinon, tournée vers l’accession dans l’ancien, moins chère (on sait que dans ce cas, la contrainte budgétaire fait que les accédants diffèrent souvent les travaux d’amélioration souhaitables).
On ne peut exclure, par ailleurs, que cet écart recouvre également un effet prix : le vendeur ou le constructeur peut en effet être tenté d’appliquer aux accédants bénéficiant d’un Pass-Foncier un prix hors taxes supérieur à ce qu’il serait pour un non bénéficiaire. Il est, en effet, difficile pour la collectivité qui accorde une aide de contrôler ce phénomène, si tant est qu’elle en ait la volonté, ce qui n’est peut-être pas toujours le cas, notamment dans les petites collectivités en zone rurale.

Il est évidemment impossible de faire la part de ces différents effets - déclenchement de la décision, financement d’une opération de meilleure qualité ou plus importante, confiscation d’une partie de l’aide par le vendeur ou le constructeur. En tout état de cause, l’écart de coût semble indiquer que l’effet de l’aide véhiculée par le Pass-Foncier, qui s’ajoute à celle apportée par le PTZ majoré et à l’aide locale, pose un problème d’équité entre les ménages situés de part et d’autre des plafonds de ressources.

Comment éviter qu’une part de l’aide soit captée par le constructeur ou par le vendeur du logement ou du terrain ?

Plus l’aide accordée est importante, plus elle est visible et plus la tentation est forte pour le constructeur ou le vendeur du logement ou du terrain de s’en approprier une partie : c’est d’autant plus facile qu’il en reste une part substantielle à l’accédant.

De quels moyens les collectivités disposent-elles pour prévenir ou au moins limiter ce risque ?
Lorsqu’il s’agit de l’achat à un promoteur, il suffit de réserver l’aide aux acquisitions en deçà d’un prix plafond fixé en €/m² de surface habitable. C’est ce que font certaines collectivités locales, dont certaines vont même jusqu’à agréer des opérations éligibles à leur aide. Il faut évidemment que le prix plafond soit réaliste, ce qui suppose une négociation préalable avec le promoteur(1).

Dans le cas de la construction d’une maison individuelle, le plafonnement global du coût de l’opération ne suffit pas, il faut fixer une limite d’une part au prix du terrain, d’autre part au coût de la construction. En ce qui concerne le terrain, le plafond doit évidemment être déterminé en fonction des conditions du marché local.
En tout état de cause, la collectivité locale est la mieux à même de contrôler le prix. Mais elle n’en a pas forcément la volonté, notamment lorsqu’elle est aussi le vendeur du terrain (lotissements municipaux).

Sauf peut-être dans les zones rurales, la fixation de prix plafonds nationaux, même avec une différenciation par zone, se heurte à la difficulté de tenir compte de façon suffisamment fine des conditions des marchés locaux. L’exemple des plafonds de loyers retenus pour les opérations «Robien» montre que les loyers ainsi définis étaient souvent largement supérieurs aux loyers de marché et ne pouvaient avoir pour seul effet que de laisser espérer à l’investisseur un rendement très surévalué. A l’inverse, des plafonds trop bas ont un effet dissuasif, comme l’illustre l’échec du conventionnement privé dans les marchés tendus.


Note : Cf. Etude ANIL, février 2010 «Le maire, l’accession sociale et le promoteur».

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