Impact de l’interdiction du cumul assurance impayés de loyers et caution issue de la loi du 25 mars 2009
ANIL, extrait d'Habitat Actualité, juillet 2009
Deux mois après l’entrée en vigueur de l’article 55 de la loi MLLE du 25 mars 2009 qui interdit pour les bailleurs personnes physiques (ou les sociétés civiles immobilières à caractère familial), le cumul assurances impayés de loyers et caution, une brève enquête1 auprès de 29 ADIL2 a été conduite pour savoir quel impact immédiat avait cette mesure sur la sélection des locataires.
Il en ressort qu’un certain nombre de locataires ont effectivement vu leur candidature écartée au motif que le bailleur ne pouvait plus cumuler assurance et caution. Cet argument était utilisé essentiellement par des professionnels de l’immobilier qui, à la différence des bailleurs privés, ont été immédiatement informés des nouvelles dispositions qui les obligent à modifier leur pratique.
Craignant une montée des risques d’impayés à la fois liée à la suppression de la caution et au contexte économique, certains, arguant le cas échéant des exigences de l’assureur, ont resserré les critères de sélection et ne retiennent que les locataires justifiant de revenus au moins trois fois supérieur au loyer charges incluses, ce qui n’était pas systématique auparavant.
Certains professionnels ont immédiatement informé les bailleurs dont ils gèrent les logements du changement de législation et demandent à ceux de leurs mandants qui avaient souscrit une assurance impayés de loyer leur accord pour opter pour la Garantie des Risques Locatifs (Pass-Grl®).
Pratique courante, pour éluder temporairement de nouvelles mesures ressenties comme contraignantes, dans les jours qui ont suivi la publication de la loi du 25 mars 2009, un certain nombre de contrats de location ont été antidatés pour tenter de s’affranchir de l’interdiction du cumul caution assurance, mais cette pratique n’a qu’un temps.
Plus préoccupant, certaines agences, estimant que l’afflux de dossiers GRL, et donc à leurs yeux de locataires moins solvables, va alourdir leur travail, majorent leurs honoraires : ajoutés à la cotisation de l’assurance GRL qu’ils ont souscrite au taux de 1,80%, ces frais de gestion peuvent aller jusqu’à porter le coût de la GRL pour le bailleur à 3% du montant du loyer et des charges.
Du côté des bailleurs gérant eux-mêmes leur logement, qui constituent près de 30% des consultations sur les rapports locatifs dans les ADIL, le refus de louer sans caution, en augmentation régulière d’une enquête à l’autre , concerne le plus fréquemment les zones où le marché est tendu, les étudiants ou les personnes âgées à faibles ressources : la majorité des ADIL ne signale pas, pour le moment, de changements liés à la loi dans le comportement des bailleurs.
Ceux qui exigeaient une caution continuent de l’exiger, sans qu’on sache s’ils font partie des 10% des bailleurs gérant leur location qui ont souscrit une assurance impayés de loyers . Si c’est le cas, ils sont dans l’illégalité ; dans le cas contraire, ils peuvent continuer à demander une caution.
La demande de caution devrait en principe diminuer à proportion de la montée de la Garantie des Risques Locatifs, laquelle est encore mal connue, même si plusieurs ADIL perçoivent une amélioration. Les ADIL attirent systématiquement l’attention des bailleurs gérant eux-mêmes leur logement, sur sa mise en place, sans pouvoir affirmer qu’elles parviennent à les convaincre tous de la souscrire.
Il reste des réticences à vaincre, notamment chez les bailleurs âgés, pour voir une progression importante dans le parc privé. Plusieurs ADIL ont l’impression que les bailleurs les plus jeunes et notamment ceux qui ayant investi dans des logements neufs ne peuvent prendre le risque d’impayés, sont plus réceptifs au principe de souscrire une assurance impayés de loyers, pourvu qu’ils puissent la trouver facilement (ce qui ne semble pas partout le cas actuellement) et que la procédure ne leur apparaisse pas compliquée. La GRL fait d’ailleurs partie du package proposé par les vendeurs d’investissements locatifs.
L’évolution de la GRL devrait aller en ce sens. Après avoir rappelé que 55 à 60% de la population3 ne remplit plus les critères pour accéder à un logement locatif, Jean-Luc Berho, président de l’APAGL, Association pour l’accès aux garanties locatives, a en effet confirmé lors de la conférence de presse trimestrielle de la Fnaim le 7 juillet dernier, que la GRL couvrira l’ensemble des salariés du secteur privé non agricole, les demandeurs d’emplois et les fonctionnaires, ces derniers étant pris en charge sur le fonds abondé par l’Etat. Elle concernera les locataires dont le taux d’effort est inférieur à 50% et couvrira le bailleur jusqu’à un montant de loyer de 2000 euros par mois dans la limite de 70 000 euros. Jean-Luc Berho a indiqué qu’une négociation est en cours avec l’Etat pour la prise en charge des catégories non couvertes à l’heure actuelle (les salariés agricoles, les étudiants non boursiers et non salariés, les professions libérales et les commerçants).
Notes
1. Trois questions étaient posées :
- Constatez-vous cette difficulté dans votre département ? A quelle fréquence ?
- De façon générale, constatez-vous le refus des bailleurs de sélectionner un locataire qui n’a pas de caution ?
- Percevez-vous une évolution des bailleurs concernant la GRL : vous semblent-ils davantage enclins à la souscrire ?
2. ADIL 06, 12, 16, 17, 19, 20, 24, 29, 31, 32, 34, 38, 39, 46, 49, 54, 56, 60, 63, 64, 69, 74, 75, 89, 81, 86, 87, 91, La Réunion.
3. Ce pourcentage correspond à l’addition des personnes aux revenus insuffisants ou instables : les salariés à temps partiel, CDD, intérimaires, demandeurs d’emploi, salariés saisonniers agricoles, bénéficiaires du RSA, retraités au minimum vieillesse, étudiants.