Livre blanc sur l’intégration du marché européen du crédit hypothécaire
ANIL, extrait d'Habitat Actualité, janvier 2008
En matière de crédit hypothécaire, la Commission européenne ne manque pas d'opiniâtreté, mais force est de reconnaître qu'elle progresse lentement. La publication du livre blanc qu'elle consacre à cette question intervient, il est vrai, à un moment difficile : il est impossible de faire abstraction de la crise des subprime lorsque l'on traite de l'intégration du marché hypothécaire. L’encours de crédit hypothécaire représente en moyenne 47 % du produit intérieur brut des pays de l’UE, (29,5 % en France et 80 % au Royaume Uni). La Commission évalue les enjeux de l'intégration en se fondant sur divers rapports d’experts. L’augmentation du PIB pourrait atteindre 0,7 % au cours des dix prochaines années selon une étude de la London school of economics, et entre 0,12 % et 0,24 % par an selon l’expertise du cabinet Mercer, Oliver et Wyman. Les taux pourraient baisser de moins de 50 points de base d'ici 2015 et les consommateurs pourraient avoir accès dans tous les pays à une gamme de produits plus étendue. La question du lien entre développement du marché hypothécaire et accès au logement n'est pas envisagée.
Que faudrait-il faire pour parvenir à une meilleure intégration ? La Commission reconnaît que le potentiel est limité, tant le crédit hypothécaire est un produit lié à l'ancrage des biens immobiliers qu'il contribue à financer. Il reste cependant souhaitable de lever les obstacles qui empêchent les prestataires de services financiers de proposer des crédits dans des pays autres que le leur, que ce soit en s'y établissant ou en y créant des filiales ou en s'y faisant représenter par des intermédiaires.
Les principaux blocages ont été identifiés de longue date, ils sont de nature réglementaire et tiennent, pour un pays comme la France, au très haut niveau de protection du consommateur auquel il lui faudrait renoncer. On mentionnera à titre d'exemple "les restrictions aux taux d'intérêt comme les règles de prévention de l'usure, les plafonds imposés aux taux d'intérêt variables; l'interdiction de proposer des intérêts cumulés, etc.), pratiqués par certains pays sont susceptibles d'empêcher la circulation de certains produits d'un pays à l'autre".
Crise des subprime oblige, la Commission insiste sur la protection du consommateur, sur son information et sur le devoir de conseil qui devrait peser sur les établissements de crédit. La Commission souhaite également que le consommateur puisse faire jouer la concurrence et pour cela, que les ventes liées (d'assurances par exemple) soient interdites et que soit proscrit tout ce qui retient le consommateur de changer d'établissement, comme par exemple l'exigence de domiciliation des comptes des emprunteurs.
La Commission est attachée à une meilleure transparence des registres fonciers, "elle encouragera les Etats membres à adhérer au projet Eulis", qui réunit actuellement 10 Etats, elle les invitera également à plus de vigilance et de célérité en matière de saisie. Reste la question essentielle qui porte sur la comparabilité des offres et de ce point de vue, il n'y a rien de vraiment nouveau.
La Commission prend acte du relatif échec de la mise en place du code de conduite. Elle considère que "l'harmonisation du taux annuel effectif global est essentielle" qu'il s'agisse des éléments qui entre dans son assiette ou son mode de calcul. Nombre d'expertises ont été demandées par la Commission sur ce sujet, notamment celle faite par l'ANIL en 1993; la Commission n'a pas réussi à imposer une règle auprès de tous les Etats membres, comme elle l'a fait pour le crédit à la consommation. On notera qu’en France, le mode de calcul du taux reste différent selon qu’il s’agit d’un prêt au logement ou d’un prêt à la consommation; dans un cas il est actuariel, dans l’autre proportionnel.
Quant à la question du remboursement anticipé, la Commission la considère comme l'une des principales et affirme qu'il est de sa responsabilité, et de celle des Etats et du Parlement européen de lui apporter une solution "satisfaisante" La Commission ajoute à ses centres d’intérêt les nouveaux produits hypothécaires apparus sur le marché ces dernières années, notamment l’hypothèque rechargeable et le prêt viager hypothécaire.
Le livre blanc se termine par un programme de travaux à réaliser dans les trois prochaines années.