Mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat
N° 2022-13 / À jour au 13 juin 2023
Loi du n° 2022-1158 du 16.8.22 : JO du 17.8.22 / décret n°2023-133 24.2.23 : JO du 26.2.23 / décret n°2023-182 du 16.3.23 : JO du 17.3.23 / décret n° 2023-417 du 31.5.23 : JO du 1.6.23
Le projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat a été présenté en Conseil des ministres le 7 juillet 2022. Il a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 22 juillet 2022 et par le Sénat le 29 juillet 2022. Réunie le 1er août 2022, la Commission mixte paritaire est parvenue à un accord.
Le texte a été définitivement adopté, par l’Assemblée nationale et le Sénat, le 3 août 2022.
Saisi par deux recours parlementaires, le Conseil constitutionnel a rendu sa décision le 12 août 2022 (CC : 12.8.22, n° 2022-843 DC), jugeant conformes (avec réserves) les dispositions qui lui étaient déférées, notamment concernant le plafond d’émissions de gaz à effet de serre applicable aux installations de production d’électricité à partir de combustibles fossiles (art. 36) et les mesures visant à réguler l’accès à l’électricité nucléaire historique (art. 39 et 40) ; sa décision n’affecte pas les dispositions en lien avec le logement.
La loi du 16 août 2022 a été publiée au Journal officiel le 17 août 2022.
Le texte est structuré autour de quatre titres :
- la protection du niveau de vie des français ;
- la protection du consommateur ;
- la souveraineté énergétique ;
- des dispositions relatives au transport routier de marchandises.
Il comporte certaines mesures en lien avec le logement.
Les dispositions faisant l’objet de la présente analyse entrent en vigueur le 18 août 2022, à l’exception des mesures relatives à la revalorisation des prestations sociales qui s’appliquent dès le 1er juillet 2022.
Par ailleurs, certaines mesures entrent en vigueur en fonction des textes réglementaires.
Aides et prestations sociales
Revalorisation anticipée des prestations sociales
(loi : art. 12, I / CCH : L.823-4)
Pour mémoire, la revalorisation annuelle des montants de pensions de retraite et de prestations sociales est habituellement :
- effectuée sur la base d'un coefficient égal à l'évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac ;
- calculée sur les 12 derniers indices mensuels de ces prix publiés par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), l'avant-dernier mois qui précède la date de revalorisation des prestations concernées.
Au regard de la forte augmentation de l’inflation observée depuis le début de l’année 2022, la loi prévoit une revalorisation exceptionnelle des prestations sociales de 4 % (coefficient égal à 1,04). Elle s’applique, par anticipation des mécanismes de droit commun, dès le 1er juillet 2022.
Cette mesure sera appliquée sur les droits et prestations sociales, parmi lesquelles notamment :
- les pensions de retraite et d’invalidité des régimes de base ;
- les prestations familiales ;
- les minima sociaux, dont le Revenu de solidarité active (RSA), l’Allocation aux adultes handicapés (AAH) et l’Allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa).
Cette revalorisation ne sera pas cumulative, mais s'imputera, lors de la prochaine revalorisation annuelle des prestations concernées, sur le coefficient qui sera alors applicable. Il s'agit donc d'une avance sur la revalorisation devant intervenir en 2023.
Revalorisation des aides au logement
(loi : art. 12, I / CCH : L.823-4)
Pour mémoire, les aides personnelles au logement - Aide personnalisée au logement (APL), Allocation de logement sociale (ALS) et Allocation de location familiale (ALF) - sont revalorisées chaque année. Les paramètres représentatifs de la dépense de logement sont normalement revalorisés au 1er octobre, tandis que les paramètres relatifs aux ressources sont révisés au 1er janvier.
Les paramètres de dépense de logement sont :
- les plafonds de loyer ;
- les plafonds des charges de remboursement de contrats de prêts dont la signature est postérieure à la date de révision du barème ;
- les montants forfaitaires de charges ;
- les équivalences de loyer et de charges locatives ;
- le terme constant de la participation personnelle du ménage (P0).
Afin de prendre en compte le niveau élevé d’inflation déjà constaté et de limiter des hausses excessives de dépenses de logement pour les locataires, un dispositif dérogatoire est mis en place, prévoyant que, pour 2022, ces paramètres sont revalorisés par anticipation de 3,5 %, dès le 1er juillet 2022 (se substituant ainsi à la revalorisation de droit commun prévue au 1er octobre).
La revalorisation des paramètres relatifs aux ressources (forfaits de ressources étudiant et montant forfaitaire R0 du barème locatif ordinaire) relève quant à elle du domaine réglementaire. En ce sens, le décret du 29 juillet 2022 et l’arrêté du 29 juillet 2022, tous deux relatifs au calcul des aides personnelles au logement, procèdent à une revalorisation, de manière anticipée, des paramètres relatifs aux ressources intervenant dans la formule de calcul des aides personnelles au logement en secteur locatif. Le montant forfaitaire R0 du barème locatif ordinaire est ainsi déjà revalorisé de 4 % (comme ce qui est prévu pour les autres prestations sociales), tandis que le forfait de ressources applicable aux étudiants est revalorisé de 3,5 % (ce qui correspond au montant plafonné de l’IRL). Cette revalorisation est applicable aux prestations dues à compter du 1er juillet 2022.
Déconjugalisation de l’AAH
(loi : art. 10 / CSS : L.821-1 et L.821-3 / décret n° 2023-360 du 11.5.23)
Pour mémoire, l’Allocation aux adultes handicapés (AAH) a été créée par la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées, du 30 juin 1975, afin de répondre à une obligation nationale de garantir un minimum de ressources aux personnes en situation d’invalidité et dans l’impossibilité, compte tenu de leur handicap, d’obtenir et d’exercer un emploi (CSS : L.821-1 à L.821-3).
La loi introduit plusieurs dispositions relatives à la “déconjugalisation” de l’AAH.
Le décret n° 2023-360 du 11 mai 2023 est venu les préciser. Il s’agit de supprimer la prise en compte des revenus du conjoint pour l'attribution et le calcul du montant de l'AAH (décret n° 2023-360 / CSS : D.821-2, al.2 et D.821-5, al.2). En ce sens, est supprimé le statut "marié ou vit maritalement ou est lié par un pacte civil de solidarité" des dispositions encadrant le calcul de l’AAH, lorsque celle-ci est versée en complément des autres ressources du bénéficiaire ou dans le cadre du plafonnement de l’allocation. Le nombre de personnes à charge demeure quant à lui pris en compte.
Ces nouvelles modalités de calcul entreront en vigueur le 1er octobre 2023.
La loi prévoit un dispositif transitoire : à la date d’entrée en vigueur de la mesure, toute personne qui bénéficiera d’ores et déjà de l’AAH pourra continuer d’en bénéficier selon les modalités antérieures et jusqu’à l’expiration de ses droits à l’allocation, lorsque ces modalités lui seront plus favorables.
Rapports locatifs
Plafonnement de l’évolution de l’IRL
(loi : art. 12, II à V)
L'Indice de référence des loyers (IRL) est publié chaque trimestre par l’Insee. Il correspond à la moyenne sur les 12 derniers mois de l'évolution des prix à la consommation hors tabac et hors loyers.
Une importante hausse des prix à la consommation a pu être observée au cours du premier semestre 2022. Cette accélération de l’inflation a entraîné une forte augmentation de la variation des premiers IRL publiés en 2022, ce qui est susceptible de conduire à une importante augmentation des loyers (l’IRL du deuxième trimestre a par exemple évolué de 3,6 % en 2022, contre 0,83 % en 2021).
Afin de prendre en compte le niveau élevé d’inflation et de limiter la charge financière que représente le loyer dans les dépenses des ménages, un plafonnement temporaire et dérogatoire de la variation de l’IRL est prévu pour les indices du troisième trimestre 2022 au 2ème trimestre 2023. Ainsi, la variation en glissement annuel de l’IRL ne pourra pas excéder 3,5 %.
Le plafonnement de la variation de l’IRL s’impose :
- dans le parc locatif privé, concernant :
- la révision du loyer, en application de l’article 17-1, I, de la loi du 6 juillet 1989 ;
- la révision du loyer réévalué lors du renouvellement du contrat (loi du 6.7.89 : art.17-2) ;
- en zone d’encadrement du niveau des loyers, la fixation du loyer lors du renouvellement du contrat (loi ELAN : art. 140, VI) ;
- dans le parc locatif social, concernant :
- l’évolution des plafonds de loyer des conventions APL (CCH : L.353-9-2) ;
- la révision annuelle, au 1er janvier, des loyers pratiqués des logements conventionnés (CCH : L.353-9-3) ;
- la révision annuelle, au 1er janvier, des loyers pratiqués des logements non conventionnés appartenant aux organismes HLM (CCH : L.442-1) ;
- l’appréciation des montants de loyer et de ressources dans le cadre de politiques de loyer spécifiques des organismes HLM, notamment ceux mettant en place une nouvelle politique des loyers (CCH : L.445-3 et L.445-3-1) ;
- aux programmes de location-accession, dans le cadre de la révision du montant de la redevance et du prix de vente (loi du 12.7.84 : art.7) ;
- aux loyers des locaux d’habitation soumis au statut du fermage et du métayage (Code rural et de la pêche maritime : L.411-11).
Dans certaines zones géographiques, des dispositions particulières sont prévues. Un amendement de l’Assemblée nationale proposait que des dérogations soient également possibles dans les zones de revitalisation rurale (amendement n°275). Cette mesure n’a toutefois pas été retenue par le Sénat et la Commission mixte paritaire.
Outre-mer : dans les collectivités d’outre-mer, la variation en glissement annuel de l’IRL ne peut excéder 2,5 %.
Corse : la variation en glissement annuel de l’IRL ne peut excéder 2 %. Cette modulation est encadrée par l’arrêté préfectoral n°R20-2022-10-11-00012 du 11 octobre 2022, pris en application de l’arrêté ministériel du 21 septembre 2022.
Cette modulation prend en compte les critères suivants :
- les caractéristiques démographiques et sociales de la population locale, dont le taux de pauvreté de la collectivité de Corse, entendu comme la part de la population dont le revenu est inférieur à 60 % du revenu médian ;
- l’existence d’un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social ;
- l’écart entre l’inflation annuelle constatée en France métropolitaine et celle constatée sur le territoire de la collectivité de Corse.
Encadrement du niveau des loyers en zones tendues et conditions du complément de loyer
(loi : art. 13 / loi du 23.11.18 : art. 140)
Pour mémoire, la loi ELAN du 23 novembre 2018 a mis en place un encadrement expérimental du niveau des loyers dans les zones tendues. Cet encadrement s’applique, sous conditions, sur demande des collectivités. À ce jour, il est en vigueur à Paris, Lille et ses communes associées (Hellemmes et Lomme), Lyon, Villeurbanne, Montpellier et Bordeaux, ainsi que dans les communes des Établissements publics territoriaux (EPT) Plaine Commune et Est Ensemble (cf. Analyse juridique n°2019-03).
Dans les zones concernées, le loyer des logements doit être fixé dans la limite d’un loyer de référence majoré, publié chaque année par arrêté préfectoral. Cette fixation du loyer doit également respecter les modalités de l’encadrement de l’évolution des loyers (cf. Analyse juridique n°2015-13).
Un complément de loyer peut néanmoins être appliqué à ce loyer de base pour des logements présentant des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant, par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique. Ces caractéristiques n’étant pas détaillées par la loi ELAN, elles font l’objet d’une appréciation souveraine du tribunal en cas de litige.
Afin d’encadrer plus précisément les conditions dans lesquelles un complément de loyer peut être prévu au contrat, il est désormais prévu qu’aucun complément de loyer ne puisse être appliqué lorsque le logement présente une ou plusieurs des caractéristiques suivantes :
- des sanitaires sur le palier ;
- des signes d’humidité sur certains murs ;
- un niveau de performance énergétique F ou G (au sens de CCH : L.173-1-1) ;
- des problèmes d’isolation thermique des murs ou du toit ;
- des fenêtres laissant anormalement passer l’air hors grille de ventilation ; un vis-à-vis à moins de dix mètres ;
- des infiltrations ou des inondations provenant de l’extérieur du logement ; des problèmes d’évacuation d’eau au cours des trois derniers mois ;
- une installation électrique dégradée ;
- une mauvaise exposition de la pièce principale.
Protection du consommateur
Résiliation de contrats
Contrats conclus par voie électronique : modalités de résiliation
(loi : art. 15 / C. conso : L.215-1-1 [nouveau], L.215-2 et L.241-3-1 [nouveau])
Face au constat de la difficulté pour les consommateurs de résilier les contrats en raison d’un formalisme plus important que lors de la souscription, la loi prévoit de faciliter la résiliation des contrats souscrits par voie électronique.
Cette disposition aura un impact sur la concurrence, permettant, dans un contexte inflationniste, aux consommateurs de résilier facilement leur contrat pour choisir un contrat plus avantageux, notamment en terme de prix. La préservation de la liberté de choix du consommateur et de sa capacité à faire jouer la concurrence est une condition déterminante pour le maintien de son pouvoir d’achat (cf. étude d’impact).
Tout d’abord, ces contrats pourront également être résiliés à distance. Pour ce faire, le professionnel devra mettre à la disposition des consommateurs une fonctionnalité gratuite permettant d’accomplir, par voie électronique, la notification et les démarches nécessaires à la résiliation des contrats souscrits.
Ensuite, lorsque le consommateur notifiera la résiliation du contrat, le professionnel devra lui confirmer la réception de la notification et l’informer de la date à laquelle le contrat prendra fin et des effets de la résiliation. Cette information devra s’opérer via un support durable et dans des délais raisonnables.
Ces nouvelles modalités de résiliation seront également applicables lorsque le contrat a été conclu par un autre moyen, mais que le professionnel, au jour de la résiliation par le consommateur, offre la possibilité de conclure des contrats par voie électronique.
Le décret du 31 mai 2023 précise les modalités techniques permettant de garantir une identification du consommateur et un accès facile, direct et permanent à cette fonctionnalité. Ainsi, par exemple, la fonctionnalité de résiliation doit être accessible depuis l'interface en ligne, sous la mention “résilier votre contrat” ou une formule analogue. De plus, des conditions de résiliation (comme un délai de préavis, une indemnité de rupture...) sont possibles, sous réserve qu’elles soient présentées de manière lisible et compréhensible. Il définit également les informations devant être produites par le consommateur. Lorsque le consommateur résilie le contrat de façon anticipée, la possibilité de résilier est subordonnée à l'existence d'un motif légitime. Le consommateur doit être informé des modalités pour justifier de ce motif. Les mesures issues de ce décret s’appliquent aux contrats d’assurance (notamment l’assurance habitation) depuis le 1er juin 2023, qu’ils soient en cours ou futurs, souscrits sur papier ou par voie électronique.
Contrairement aux autres dispositions du Code de la consommation, relatives à la reconduction et à la résiliation des contrats de prestations de services, cette mesure sera également applicable aux exploitants des services d'eau potable et d'assainissement.
Tout manquement à ces modalités de résiliation des contrats par voie électronique sera passible d’une amende administrative, dont le montant ne pourra excéder 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale. Cette amende pourra être prononcée par l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation (C. conso : L.522-1 à L.522-10).
Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er juin 2023. Elles sont applicables aux contrats en cours d’exécution à la même date.
Contrats de téléphonie et d’internet
(loi : art. 15 / C. conso : L.224-28)
Pour mémoire, en matière de téléphonie et d’internet, le consommateur peut mettre un terme à son contrat par anticipation, s’il prévoit une durée minimale d’engagement. La résiliation ne peut intervenir qu’à compter de la fin du douzième mois avant l’échéance (par exemple lorsqu’il est engagé pendant 24 mois) et s’opère en contrepartie du versement d'un montant plafonné au quart des mensualités restant dues (loi Chatel n° 2008-3 du 3.1.08 : art.17). La loi supprime ces frais de résiliation.
En revanche, dans le cadre d’offres permettant aux consommateurs de bénéficier de la vente d’un équipement terminal subventionné, la faculté de résiliation pourra être soumise au paiement par le consommateur d’au plus 20 % du montant dû au titre de la fraction non échue de la période minimum d’exécution du contrat.
Ces dispositions seront applicables aux contrats conclus depuis le 1er janvier 2023.
Cas particulier des consommateurs en situation de surendettement
(loi : art. 15 / C. conso : L.224-37-1 [nouveau] et D.215-2, II [nouveau])
La protection des personnes en situation de surendettement est renforcée.
Un consommateur ayant formé une demande de traitement de situation de surendettement jugée recevable pourra résilier à tout moment un abonnement internet ou de téléphonie.
Les montants dus au titre de la fraction non échue de la période courant jusqu’à la fin de l’engagement contractuel, ainsi que les sommes dues au titre de la résiliation anticipée, ne pourront pas lui être réclamés.
Les dettes éventuellement contractées auprès des fournisseurs d’accès à internet ou auprès d’un service de communications vocales font en revanche partie de plein droit du passif dressé par la commission de surendettement des particuliers (C. conso : L.723-1 à L.723-4).
La fonctionnalité de résiliation en ligne doit comporter une rubrique permettant au consommateur de préciser ce motif légitime et de l'informer du justificatif qu'il doit produire (cf. § Contrats conclus par voie électronique : modalités de résiliation).
Pour que le consommateur puisse transmettre ce justificatif, la fonctionnalité doit permettre d'adresser au professionnel sous une forme dématérialisée un justificatif du motif légitime de résiliation ou mentionner une adresse électronique à laquelle le consommateur peut envoyer ce justificatif. L'adresse postale à laquelle le justificatif peut être envoyé doit également y figurer.
Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er juin 2023. Elles sont applicables aux contrats conclus depuis le 1er janvier 2023.
Contrats de fourniture de service de télévision et médias audiovisuels à la demande
(loi : art. 16 / C. conso : L.215-1)
En principe, pour les contrats de prestations de services conclus pour une durée déterminée avec une clause de reconduction tacite, le consommateur ne peut mettre un terme à son engagement qu’à la fin de chaque période contractuelle. Il est tenu informé de cette faculté par le professionnel au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant la date limite de non-reconduction.
Une exception à ce principe est introduite concernant les contrats de fourniture de service de télévision et de médias audiovisuels à la demande. Pour ces contrats, le consommateur peut désormais mettre gratuitement un terme au contrat, à tout moment, à compter de la première reconduction, dès lors qu’il change de domicile ou que son foyer fiscal évolue.
Contrats d’assurance
(loi : art. 17 / Code des assurances : L.113-14 / Code de la mutualité : L.221-10-3 / Code de la sécurité sociale : L.932-12-2 et L.932-21-3 / décret n°2023-182 du 16.3.23)
Lorsque l’adhésion à un règlement ou l’affiliation ou la souscription d’un contrat d’assurance couvrant les personnes physiques en dehors de leurs activités professionnelles a été effectuée par voie électronique, la résiliation pourra être effectuée selon les mêmes modalités.
Le professionnel (organisme d’assurance ou institution de prévoyance) devra mettre à la disposition des consommateurs une fonctionnalité gratuite permettant d’accomplir, par voie électronique, la notification et les démarches nécessaires à la résiliation des contrats souscrits.
Ces nouvelles modalités de résiliation seront également applicables lorsque le contrat a été conclu par un autre moyen, mais que le professionnel, au jour de la résiliation par le consommateur, offre la possibilité de conclure des contrats par voie électronique.
Les modalités de cette résiliation sont précisées par le décret du 16 mars 2023. Elles sont encadrées dans les mêmes conditions que celles prévues par le Code de la consommation (fonctionnalité gratuite, réception de la notification par le professionnel) et (cf. § Contrats conclus par voie électronique : modalités de résiliation).
Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er juin 2023. Elles s’appliqueront aux contrats en cours d’exécution.
Contrats d’assurance “doublons”
(loi : art. 18 / Code des assurances : L.112-10)
Un contrat d'assurance dit “affinitaire” est un contrat dont la souscription est proposée par le fournisseur d'un bien ou d'un service en complément de celui-ci (par exemple lors de la réservation d’un vol ou d’un hôtel).
Pour mémoire, il était prévu que lorsque ce contrat couvre des risques pour lesquels l'assuré est déjà couvert par un contrat antérieur, l’assuré peut y renoncer, dans un délai de 14 jours à compter de la souscription du nouveau contrat (Code des assurances : L.112-10). Cette faculté était initialement subordonnée à la justification d'une garantie antérieure pour l'un des risques couverts par ce nouveau contrat.
La loi prévoit que la renonciation n’est plus enfermée dans un délai de 14 jours, mais désormais de 30 jours. Lorsque l’assuré bénéficie d’une ou de plusieurs primes d’assurance gratuites, ce délai ne court qu’à compter du paiement de tout ou partie de la première prime. Par ailleurs, elle supprime la condition de justification d'une garantie antérieure pour l'un des risques couverts par ce nouveau contrat.
Ces nouvelles conditions de renonciation sont entrées en vigueur le 1er janvier 2023. Elles sont applicables dans les îles Wallis et Futuna.
Contrats d’assurance emprunteur
(loi : art. 19 / Code de la mutualité : L.221-10)
Pour mémoire, la loi du 28 février 2022 “pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur” (cf. Analyse juridique n° 2022-03) a simplifié les conditions de résiliation des contrats d’assurance emprunteur, qui garantissent un crédit immobilier.
La présente loi procède à des ajustements rédactionnels afin de préciser les modalités pratiques pour l’assuré, tenu d’informer son assureur de son choix de procéder à une substitution d’assurance. En ce sens, les moyens par lesquels l’assuré peut notifier à sa mutuelle son souhait de résilier sont élargis.
La notification de la résiliation peut être effectuée, au choix de l'assuré :
- par lettre ou tout autre support durable ;
- par déclaration faite au siège social ou chez le représentant de la mutuelle ou de l'union ;
- par acte extrajudiciaire ;
- lorsque la mutuelle ou l'union propose la conclusion de contrat ou l'adhésion au règlement par un mode de communication à distance, par le même mode de communication ;
- par tout autre moyen prévu par le contrat ou le règlement.
Le texte précise également que la décision de la mutuelle doit ensuite être transmise au nouvel assureur par lettre recommandée ou envoi recommandé électronique.
Lutte contre les pratiques commerciales déloyales
(loi : art. 20 / Code du commerce : L.461-3, L.464-9 et L.470-1 / C. conso : L.132-2-1, L.132-2-2, L.132-11-1, L.132-11-2 [nouveaux], L.454-1, L.512-20, L.512-22-2 [nouveau], L.521-1, L.521-2 et L.521-3-1 / décret n° 2022-1701 du 29.12.22)
Afin de protéger les consommateurs et leur pouvoir d’achat, la loi renforce le dispositif existant en matière de lutte contre certaines pratiques commerciales déloyales :
- en relevant les peines en cas de pratiques commerciales trompeuses ou agressives ;
- en renforçant les mesures de publicité des injonctions ou des transactions prononcées par les agents Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ou par l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation, dans des conditions définies par le décret du 29 décembre 2022 ;
- en alourdissant les sanctions en cas de pratiques commerciales trompeuses ou agressives (lors de la conclusion d’un contrat résultant de ce type de pratiques et lorsqu’elle est commise en bande organisée) ;
- en renforçant les prérogatives des agents habilités au titre du code de la consommation et de l’autorité administrative chargée de la concurrence ;
- en facilitant les échanges d’information entre les officiers de police judiciaire et les agents habilités au titre du code de la consommation.
Ces dispositions sont susceptibles de s’appliquer notamment aux professionnels de l’immobilier.
Incidents d’opérations de paiement
Limitation des frais perçus au titre des incidents de paiement
(loi : art. 21 / Code monétaire et financier : L.133-26)
À compter du 1er février 2023, lorsque plusieurs demandes de paiement concernant la même opération de paiement sont rejetées, le prestataire de services de paiement devra rembourser à l’utilisateur les frais perçus au titre de ces incidents au-delà du montant prélevé au titre du premier rejet.
Protection en cas d’opération de paiement non autorisée
(loi : art. 22 / Code monétaire et financier : L.133-18)
En cas d’opération de paiement non autorisée, le prestataire de services de paiement du payeur est tenu de plusieurs obligations, notamment celle de lui rembourser immédiatement le montant de l’opération concernée.
En cas de méconnaissance de ses obligations, le prestataire pourra faire l’objet des pénalités suivantes :
- les sommes dues produisent intérêt au taux légal majoré de cinq points ;
- au-delà de sept jours de retard, les sommes dues produisent intérêt au taux légal majoré de dix points ;
- au-delà de 30 jours de retard, les sommes dues produisent intérêt au taux légal majoré de 15 points.
Coupures d'électricité
(loi : art. 35 / Code de l’action sociale et des familles : L.115-3 / décret n°2023-133 du 24.2.23)
Pour mémoire, une disposition législative particulière protège les ménages, dans le cadre de leur résidence principale, en période de trêve hivernale (du 1er novembre de chaque année au 31 mars de l'année suivante). En effet, durant cette période, les fournisseurs d'électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder à l'interruption, y compris par résiliation de contrat, pour non-paiement des factures, de la fourniture d'électricité, de chaleur ou de gaz aux personnes ou familles. Les fournisseurs d'électricité peuvent néanmoins, durant cette période, procéder à une réduction de puissance, sauf pour les consommateurs bénéficiaires du chèque énergie.
La présente loi renforce la protection des ménages, en interdisant aux fournisseurs d’électricité de procéder, durant le reste de l’année et dans une résidence principale, à l’interruption de la fourniture d’électricité, y compris par résiliation de contrat, pour non-paiement des factures, sans avoir respecté préalablement une période de réduction de puissance. Les modalités d’application de cette mesure sont fixées par le décret du 24 février 2023.
Le décret prévoit qu’en cas d’impayé, la puissance pourra être réduite jusqu'à 1 kVA puis, après un délai minimal de 60 jours, la fourniture d’énergie pourra être interrompue.
Cette mesure s’applique aux ménages bénéficiaires du chèque énergie et du Fonds de solidarité pour le logement (FSL) équipés d'un compteur communicant.
Le texte précise également que, en cas d’interruption ou de réduction, les fournisseurs devront transmettre une information au ministre chargé de l’énergie (au même titre que l’information déjà exigée auprès de la Commission de régulation de l'énergie et au médiateur national de l'énergie).
Rapports
Effacement volontaire et rémunéré des consommations d’électricité à destination des particuliers
(loi : art. 42)
Dans un contexte de crise énergétique, le Gouvernement appelle les consommateurs à la sobriété énergétique. Afin d’éviter la précarisation des ménages, il souligne qu’il est important de concilier baisse des consommations d’énergie, équilibre entre offre et demande d’électricité et rémunération des gestes citoyens en faveur de l’écologie. Ainsi, il réfléchit à la mise en œuvre d’un dispositif qui pourrait prendre la forme d’une nouvelle mission de service public confiée par la loi à Enedis, chargé de mettre en œuvre la réduction volontaire des consommations d’électricité. Les fournisseurs rémunéreraient directement les particuliers ayant effectivement réduit leurs consommations.
Ainsi, la loi prévoit que, dans un délai de quatre mois à compter de sa promulgation, le gouvernement est tenu de remettre au parlement un rapport visant à mettre en place ce dispositif.
Ce rapport devra évaluer :
- les gisements d’effacements disponibles lors des pics de consommation ;
- les moyens d’inviter les particuliers à réduire leurs consommations ;
- le mode de rémunération de cet effacement ;
- les acteurs économiques concernés par le pilotage du dispositif ;
- les bénéfices en termes écologiques et économiques permis par ce même dispositif.
Exposition des collectivités territoriales aux hausses des prix de l’énergie
(loi : art. 43)
La loi prévoit que, dans un délai de six mois à compter de sa promulgation, le Gouvernement est tenu de remettre au Parlement un rapport évaluant :
- le niveau d’exposition des collectivités territoriales et de leurs groupements aux hausses des prix des énergies ;
- l’opportunité de renforcer les mesures fiscales, budgétaires et tarifaires prises pour les accompagner en tant que consommateurs finals d’énergie.
Elle précise que ce rapport devra être élaboré en lien avec la Commission de régulation de l’énergie, ainsi qu’avec les associations nationales représentant les élus locaux et les autorités organisatrices de la distribution d’énergie.
Il devra évaluer notamment l’efficacité, sur ces collectivités et ces groupements des paramètres ci-dessous réalisés depuis le 1er novembre 2021 :
- de la diminution des taxes intérieures sur la consommation d’électricité et de gaz ;
- de la modulation des tarifs réglementés de vente d’électricité et de gaz ;
- du relèvement du volume de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique.
Par ailleurs, ce rapport devra également analyser l’éventualité d’un relèvement des seuils des tarifs réglementés de vente de l’électricité prévus pour ces collectivités et ces groupements.
Évaluation des différents zonages géographiques
(loi : art. 47)
Pour mémoire, la loi du 21 février 2022 dite “3DS” prévoit que le Gouvernement doit, avant le 1er janvier 2023, remettre au parlement un rapport sur les conséquences de l’application du zonage déterminant le financement du logement social dans les communes déficitaires ou carencées (loi du 21.2.22 : art. 76 / Habitat Actualité n° spécial loi 3DS).
En plus des conséquences précitées, la présente loi ajoute que ce rapport devra rendre compte du classement des communes en fonction des zones géographiques dans lesquelles elles se situent.
Deux types de zonage seront ainsi pris en compte :
- le zonage dit I, II et III, défini par l’arrêté du 17 mars 1978 et régulièrement révisé, qui permet de déterminer, notamment :
- les plafonds de loyer du logement social (PLAI et PLUS) ;
- les plafonds de ressources permettant de percevoir une aide personnelle au logement ;
- le zonage dit A, B et C, (CCH : R.304-1) ; ce zonage classifie les communes du territoire national en zones géographiques en fonction du déséquilibre entre l'offre et de la demande de logements. Ce zonage est notamment utilisé pour l’éligibilité et pour les barèmes applicables aux aides relatives à l’investissement locatif (Pinel, Denormandie, Loc’avantages, Louer abordable), à l’accession à la propriété (prêt social location-accession, prêt à taux zéro, TVA à taux réduit en zone ANRU ou en quartier prioritaire de la ville, bail réel solidaire), ainsi qu’au logement locatif intermédiaire et pour la fixation des plafonds de loyers des logements sociaux financés en Prêt locatif social (PLS).
Au regard de ces zonages différenciés, la loi précise que le rapport a pour objectif d’évaluer :
- leur effet sur le financement et de la production de logement locatif social dans les communes soumises aux dispositions dites "SRU" (les communes où s’appliquent les articles L.302-5 à L.302-9-2 du CCH) ;
- leur adéquation en matière de calcul des aides personnelles au logement dans les zones dont les coûts immobiliers ont connu une augmentation significative au cours des cinq dernières années ;
- l’opportunité de les faire évoluer dans les territoires d'outre-mer ;
- l’opportunité de la révision et de la fusion de ces classements, à des fins de simplification et d’intelligibilité des aides.
Régulation des prix de l’énergie en outre-mer
(loi : art. 48)
La loi introduit l’obligation pour le Gouvernement de remettre au Parlement, dans un délai de six mois, un rapport sur la résilience et l’approvisionnement des systèmes énergétiques dans les outre-mer.
Cette disposition s’inscrit dans la continuité de la mission confiée en janvier 2022 à l’Inspection générale des finances sur la régulation du prix des carburants et du gaz, dans les départements d’outre-mer. Pour mémoire, cette mission visait notamment à réguler les prix pratiqués par la Société anonyme de la raffinerie des Antilles (SARA), et de mettre en exergue que d’autres alternatives d’approvisionnement existent, à moindre coût économique et écologique.