Covid-19 : mesures d'urgence
N° 2020-12 / À jour au 15 juillet 2020
La loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 a habilité le Gouvernement à prendre différentes mesures par voie d’ordonnances (cf. analyse juridique "Covid-19 : loi d'urgence").
En application de cette loi, 26 ordonnances ont été publiées au Journal officiel du 26 mars 2020.
Ces différents textes du 25 mars 2020 prévoient des mesures en lien avec le Logement.
- Prolongation de l’interdiction des coupures d’énergie et de la trêve hivernale
- Contrats de syndic de copropriété et organisation des juridictions judiciaires
- Organisation des juridictions administratives
- Prorogation exceptionnelle des délais
- Prolongation de droits sociaux
- Adaptations des règles d'organisation et de fonctionnement des établissements sociaux et médico-sociaux pour faire face à l'épidémie de covid-19
- Prolongation de la durée de validité des documents de séjour
- Contrats publics
- Mesures de continuité budgétaire, financière et fiscale des collectivités territoriales
- Mesures spécifiques pour les entreprises
L’ordonnance du 15 avril 2020 vient ajuster certaines de ces dispositions, notamment :
- la période juridiquement protégée ;
- le régime des délais de rétractation ou de réflexion ;
- les mesures judiciaires ;
- les rapports contractuels et le régime des clauses pénales ou résolutoires ;
- les délais et procédures en matière administrative ;
- les enquêtes publiques et délais applicables en matière d’urbanisme et d’aménagement.
Deux ordonnances du 22 avril 2020 apportent des compléments, concernant :
- les mandats de syndic ;
- la prolongation de la trêve hivernale à Saint Barthélémy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon ;
- les titres de séjour ;
- l’Allocation journalière de présence parentale (AJPP) ;
- le fonds de solidarité pour les entreprises ;
- les mesures relatives aux contrats publics ;
- les mesures de continuité budgétaire, financière et fiscale des collectivités territoriales.
Une ordonnance du 7 mai 2020 fixe des délais particuliers applicables en matière d'urbanisme, d'aménagement et de construction pendant la période d'urgence sanitaire.
La loi du 11 mai 2020 proroge jusqu’au 10 juillet l’état d’urgence sanitaire et reporte la fin de la trêve hivernale jusqu’à cette même date. À noter : la loi instaure de nouvelles dispositions dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire concernant la mise en quarantaine, le placement et le maintien en isolement et, notamment, afin de protéger les personnes et enfants victimes de violences ; ils ne pourront pas être mis en quarantaine, placés et maintenus en isolement dans le même logement ou lieu d'hébergement que l'auteur des violences. De même, ils ne pourront pas être amenés à cohabiter lorsque l’auteur de violences est mis en quarantaine, placé ou maintenu en isolement, y compris si les violences ne sont pas encore sanctionnées. Lorsqu'il ne peut être procédé à l'éviction de l'auteur des violences du logement conjugal ou dans l'attente d'une décision judiciaire statuant sur les faits de violence allégués et, le cas échéant, prévoyant cette éviction, leur relogement dans un lieu d'hébergement adapté devra être assuré.
Une ordonnance du 13 mai 2020 a fixé la fin de la période juridiquement protégée au 23 juin 2020 à minuit.
Une ordonnance du 20 mai 2020 porte des mesures pour permettre la tenue des assemblées générale des copropriétaires à distance.
Un décret du 20 mai 2020 organise la reprise de certains délais en matière de lutte contre l'habitat indigne.
Enfin, la loi du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire a prolongé l’état d’urgence sanitaire en Guyane et à Mayotte jusqu’au 30 octobre 2020 inclus.
Prolongation de l’interdiction des coupures d’énergie et de la trêve hivernale
(ordonnance n° 2020-331 relative au prolongement de la trêve hivernale et rapport du 25.3.20) / ordonnance n° 2020-460 du 22.4.20 relative au prolongement de la trêve hivernale pour son application à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon et rapport du 23.4.20 / loi n° 2020-546 du 11.5.20 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions)
Pour l'année 2020, la période d’interdiction des coupures d’énergie est prolongée et la date de fin du sursis à toute mesure d'expulsion locative est reportée.
Interdiction des coupures d'énergie
(CASF : L.115-3)
La fin de la période durant laquelle les fournisseurs d'énergie (électricité, de chaleur, de gaz) ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à une interruption, y compris par résiliation de contrat, pour non-paiement des factures est prolongée jusqu’au 10 juillet 2020 (la prolongation prévue par l’ordonnance du 25.3.20 prenait fin au 31.5.20). Cette mesure s’applique aux personnes ou familles éprouvant des difficultés particulières (au regard notamment de leur patrimoine, de l'insuffisance des ressources ou des conditions d'existence).
Trêve hivernale
Il est sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée jusqu'au 10 juillet 2020 (la date fixée par ordonnance du 25 mars 2020 était le 31 mai 2020), à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l'unité et les besoins de la famille (CPCE : L.412-6).
Outre-mer : la durée maximum de la période de sursis aux expulsions locatives, fixée par le représentant de l'État est prolongée de quatre mois (l’ordonnance 2020-460 prévoyait une prolongation de deux mois) en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte et à Wallis-et-Futuna (CPCE : L.611-1 et L.641-8).
La période de sursis aux expulsions locatives applicable à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon est prolongée de deux mois (confirmant ainsi les dispositions de l’ordonnance du 22.4.20) (CPCE : L.621-4 et L.631-6).
Mesures en lien avec la copropriété et organisation des juridictions judiciaires
(ordonnance n° 2020-304 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété et rapport du 25.3.20 / circulaire du 26.3.20 NOR : JUSC2008609C portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété / ordonnance n° 2020-460 et rapport du 23.4.20 / ordonnance n° 2020-595 et rapport du 20.5.20)
Contrats de syndic de copropriété
Pour faire face aux difficultés matérielles de réunion des Assemblées générales (AG) des copropriétaires, l’ordonnance du 25 mars 2020, modifiée par l’ordonnance du 22 avril 2020, prévoyait le renouvellement de plein droit des contrats de syndic arrivés à terme entre le 12 mars 2020 et l’expiration d'une période de deux mois suivant la cessation de l'état d'urgence sanitaire.
L’ordonnance du 20 mai 2020 prévoit désormais un renouvellement de plein droits des contrats de syndic arrivés à terme entre le 12 mars 2020 et le 23 juillet 2020 inclus.
Ainsi, le contrat du syndic en exercice est renouvelé jusqu’à la prise d’effet du nouveau contrat tel qu’il
résultera du vote de la prochaine AG qui interviendra au plus tard le 31 janvier 2021 (art. 22).
Les mêmes règles s’appliquent pour les mandats des membres du conseil syndical (art. 22-1).
Assemblées générales
Dématérialisation
L’ordonnance du 20 mai 2020 introduit la possibilité, pour les syndics, de prévoir que les copropriétaires ne participeront pas à l’assemblée générale (AG) en présentiel (art. 22-2 nouveau).
Dans ce cas, ils pourront participer à l’AG par visioconférence ou tout autre moyen de communication électronique permettant leur identification. Ils pourront également voter par correspondance.
Lorsque le recours à la visioconférence ou à un autre moyen de communication électronique est impossible, le syndic pourra prévoir que les décisions d’AG seront prises au seul moyen du vote par correspondance.
Si l’AG a déjà été convoquée, le syndic peut décider d’appliquer ces mesures en prévenant les copropriétaires au moins 15 jours avant sa tenue, par tout moyen permettant d’établir avec certitude la date de réception de cette information.
Le syndic peut décider des moyens et supports techniques permettant aux copropriétaires de participer à l'AG par tout moyen de communication électronique permettant leur identification, la transmission de leur voix, ainsi que la retransmission continue et simultanée des délibérations. Ces moyens et supports techniques sont utilisés jusqu'à ce que l'AG se prononce sur leur utilisation (art. 22-5 nouveau).
Convocation et organisation
Lorsque le syndic applique ces mesures, la convocation à l’AG des copropriétaires n’indique pas de lieu de convocation déterminé. Elle précise que les copropriétaires ne peuvent participer que par visioconférence, tout autre moyen de communication électronique ou par correspondance.
Lorsque le recours à un moyen de communication électronique n'est pas possible, la convocation précise que les copropriétaires ne peuvent voter que par correspondance.
Le président de séance (et le ou les scrutateurs le cas échéant) dispose d’un délai de huit jours suivant la tenue de l’AG pour certifier exacte la feuille de présence et signer le procès-verbal (art. 22-3 nouveau).
Lorsque les décisions sont prises au seul moyen du vote par correspondance, les missions du président de séance sont assurées par :
- le président du conseil syndical ;
- à défaut, l'un de ses membres ;
- en leur absence, l'un des copropriétaires votant désigné par le syndic.
Jusqu'au 31 janvier 2021, un mandataire peut recevoir plus de trois délégations de vote si le total des voix dont il dispose lui-même et de celles de ses mandants n'excède pas 15 % des voix du syndicat des copropriétaires (10 % habituellement) (art. 22-4 nouveau).
Organisation des juridictions judiciaires
La procédure civile est adaptée pour permettre, autant que possible, le maintien de l'activité des juridictions civiles, sociales et commerciales, malgré les mesures d'urgence sanitaire prises pour ralentir la propagation du virus covid-19.
Ce texte proroge, de manière générale, le terme des délais échus pendant cette période. Il précise que la prorogation des délais ne concerne pas :
- les délais prévus en matière de saisie immobilière, qui sont suspendus ;
- les délais de procédure applicables devant le juge des libertés et de la détention ;
- les délais de procédure applicables devant les juridictions pour enfants.
Organisation des juridictions administratives
(ordonnance n° 2020-305 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif et rapport du 25.3.20) / ordonnance n° 2020-558 du 13.5.20 modifiant l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif et rapport du 14.5.20)
Fonctionnement des juridictions administratives
Cette ordonnance comporte des règles dérogatoires quant à l’organisation et au fonctionnement des juridictions administratives, applicables jusqu’à la cessation de l’état d’urgence sanitaire. Elle permet en particulier de :
- faciliter la communication des pièces aux parties par tout moyen ;
- tenir des audiences à huis clos ou en publicité restreinte et de les tenir par communication audiovisuelle, voire en cas d’impossibilité, par tout moyen de communication électronique ;
- de dispenser dans toutes matières le rapporteur public d'exposer des conclusions lors de l'audience ;
- de statuer sans audience sur des requêtes présentées en référé ou sur les demandes de sursis à exécution.
Délais de procédure et de jugement
Les interruptions de délais, prévus dans l'ordonnance relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire (cf. ordonnance n° 2020-306) s’appliquent devant les juridictions de l'ordre administratif, sauf dérogations en matière de droit des étrangers, de droit électoral et d'aide juridictionnelle.
L’ordonnance du 13 mai 2020 détermine des termes fixes aux reports de ces différents délais et échéances.
Ainsi, les clôtures d’instruction dont le terme vient à échéance entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 sont prorogées jusqu’au 23 juin 2020. Les mesures d'instruction qui prennent fin entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 sont prorogées de plein droit jusqu’au 24 août 2020 inclus. Le juge peut néanmoins fixer un délai plus court si l’urgence ou l’état de l’affaire le justifie.
De plus, lorsque les délais impartis au juge pour statuer courent ou ont commencé à courir entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 inclus, leur point de départ sont reportés au 1er juillet 2020.
En outre, les règles applicables au contentieux relevant du Droit au logement opposable (DALO) après recours en injonction sont aménagées en permettant, dans certains cas, de statuer au terme d’une procédure écrite sans audience.
Le rapport au Président précise que le jugement par ordonnance s’applique "dans la seule hypothèse où il est prévu de faire droit aux demandes du requérant en l’absence de toute difficulté sérieuse" ; mesure qui ne porte donc " pas atteinte aux droits du justiciable puisque, en dehors des cas particuliers où un rejet par ordonnance est possible, qui continuent d’exister, ses prétentions ne pourront pas être rejetées sans qu’une audience n’ait été tenue".
Prorogation exceptionnelle des délais
(ordonnance n° 2020-306 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période et rapport du 25.3.20 / circulaire du 26.3.20 NOR : JUSC2008608C relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période / ordonnance n° 2020-427 du 15.4.20 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de covid-19 : JO du 16.4.20 et rapport du 15.4.20 / circulaire du 17.4.20 NOR : JUSC2009856C de présentation des dispositions du titre I de l'ordonnance n° 2020-427 du 15.4.20 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l'épidémie de covid-19 / ordonnance n° 2020-539 du 7.5.20 fixant des délais particuliers applicables en matière d'urbanisme, d'aménagement et de construction pendant la période d'urgence sanitaire / ordonnance n° 2020-560 du 13.5.20 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d’urgence sanitaire et rapport du 14.5.20)
L’ordonnance du 25 mars 2020 aménage les délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et adapte certaines procédures. Le champ d’application territorial de ces mesures est défini à l’article 14.
Elle est complétée et modifiée par les ordonnances du 15 avril 2020 et du 13 mai 2020
Période juridiquement protégée (Titre I)
Délais concernés (art. 1)
L’ordonnance du 25 mars 2020 instaurait un dispositif de report de divers délais et dates d’échéance. Elle définit pour cela une "période juridiquement protégée" qui courait initialement :
- à compter du 12 mars 2020 ;
- jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire.
L’ordonnance du 13 mai 2020 a modifié la date d’achèvement de la période juridiquement protégée.
Elle est fixée au 23 juin à minuit.
Sont expressément exclus de ce dispositif de report :
- les délais et mesures résultant de l’application de règles de droit pénal et de procédure pénale ;
- les délais et mesures concernant les élections et consultations régies par le Code électoral ;
- les délais concernant l’édiction et la mise en œuvre de mesures privatives de liberté ;
- les délais concernant les procédures d'inscription dans un établissement d'enseignement ou aux voies d'accès à la fonction publique ;
- les obligations financières et garanties y afférentes (Code monétaire et financière : L.211-36 et suivants) ;
- aux délais et mesures ayant fait l'objet d'autres adaptations particulières par la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ou en application de celle-ci.
Elle est également complétée par l’ordonnance du 13 mai 2020 qui y ajoute l'établissement des actes de l'état civil relatant des événements survenus à compter du 24 mai 2020. À compter du 24 mai 2020, les actes de l'état de civil, en particulier les déclarations de naissance, devront pouvoir être établis dans les délais prévus par la loi.
L’ordonnance du 25 mars 2020 précise que les dispositions relatives à la prorogation des délais sont applicables aux mesures restrictives de liberté et aux autres mesures limitant un droit ou une liberté constitutionnellement garantie, sous réserve qu'elles n'entrainent pas une prorogation au-delà du 30 juin 2020.
Actes concernés (art. 2)
Le texte prévoit que "tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois".
Il en est de même de tout paiement prescrit par la loi ou le règlement en vue de l'acquisition ou de la conservation d'un droit. En revanche, le paiement des obligations contractuelles n’est pas suspendu par cette mesure : "le paiement des obligations contractuelles doit toujours avoir lieu à la date prévue par le contrat" (rapport du 25.3.20).
Par exemple, le délai de recours contentieux contre un permis de construire est de deux mois à compter du premier jour d’affichage de l’autorisation sur le terrain. Au-delà, hors période d’état d’urgence sanitaire, le recours serait irrecevable. En période d’état d’urgence sanitaire, si un délai de recours contre un permis de construire devait expirer le 26 mars, il sera suspendu à partir du 12 mars 2020 et reprendra son cours à partir du 24 mai 2020 pour sa durée restant à courir
Sens et portée de la mesure : le sens et la portée de cette mesure sont précisés par l’ordonnance du 15 avril 2020 et son rapport. Elle "ne constitue ni une suspension, ni une prorogation du délai initialement imparti pour agir". Le mécanisme mis en œuvre par cet article permet simplement de considérer que l'acte ou la formalité réalisé jusqu'au 23 juin inclus sera réputé valablement fait. Il s'agit de permettre d'accomplir a posteriori (et comme si le délai avait été respecté) ce qu'il a été impossible de faire pendant la période juridiquement protégée.
Ce mécanisme ne peut fonctionner que si le délai pour agir est "prescrit" par la loi ou le règlement, "à peine" d'une sanction ou de la déchéance d'un droit.
Délais de rétractation ou réflexion : la faculté de rétractation ou de renonciation, c'est-à-dire le délai laissé par certains textes avant l'expiration duquel son bénéficiaire peut rétracter son consentement à un contrat, n'est pas un acte "prescrit" par la loi ou le règlement "à peine" d'une sanction ou de la déchéance d'un droit.
Les délais pour se rétracter ou renoncer à un contrat, par exemple en matière de vente d'immeubles à usage d'habitation (CCH : L.271-1), sont donc exclus (comme les ventes à distance ou les contrats d'assurance ou les services financiers à distance, d'assurance-vie). Cette précision vise à ne pas paralyser les transactions.
Il en est de même des délais de réflexion : ces délais avant l'expiration desquels le destinataire d'une offre contractuelle ne peut manifester son acceptation sont exclus. En effet il ne s'agit pas d'un acte devant être réalisé pendant un certain délai, à peine de sanction, mais seulement d'un temps imposé au futur contractant pour réfléchir à son engagement.
L'exclusion concerne également les délais prévus pour le remboursement d'une somme d'argent en cas d'exercice du droit de rétractation ou de renonciation.
En revanche, les délais pour la restitution d'autres biens sont bien inclus dans le champ d'application du texte.
Modalités d’application dans le temps : le rapport du 15 avril 2020 précise que l’article 2 de l’ordonnance du 15 avril a un caractère interprétatif. En conséquence, cette disposition s’applique de façon rétroactive.
Mesures administratives ou juridictionnelles (art. 3)
Certaines mesures administratives ou juridictionnelles, dont le terme vient à échéance pendant la période juridiquement protégée, sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire, soit jusqu’au 23 septembre 2020.
Sont visées :
- les mesures conservatoires, d'enquête, d'instruction, de conciliation ou de médiation ; cela concerne les saisies, les saisines de la commission départementale de conciliation en matière locative ou celles des conciliateurs de justice et des médiateurs de la consommation, notamment ;
- les mesures d'interdiction ou de suspension qui n'ont pas été prononcées à titre de sanction ;
- les autorisations, permis et agréments ; à ce titre, sont visées les autorisations d’urbanisme et les permis de construire ;
- les mesures d'aide, d'accompagnement ou de soutien aux personnes en difficulté sociale ;
- les mesures d'aide à la gestion du budget familial.
L’ordonnance du 15 avril 2020 précise que cette prorogation ne joue qu’en l’absence de décision prise par l’autorité compétente dans la période juridiquement protégée.
Ainsi, le juge ou l'autorité compétente peut modifier ces mesures ou y mettre fin.
Il peut également prescrire leur application ou en ordonner de nouvelles en fixant un délai qu'il détermine, lorsque les intérêts dont il a la charge le justifient. Dans tous les cas, le juge ou l'autorité compétente tient compte, dans la détermination des prescriptions ou des délais à respecter, des contraintes liées à l'état d'urgence sanitaire.
Rapports contractuels (art. 4 et 5)
Pour les contrats, les dispositions de droit commun s’appliquent, notamment en ce qui concerne la suspension de la prescription pour l’impossibilité pour agir (Code civil : art. 2224) ou le jeu de la force majeure (Code civil : art. 1218), si les conditions appréciées au cas par cas en sont remplies (rapport du 25.3.20).
Le report des délais pendant la période juridiquement protégée n’a pas pour effet de reporter le terme des contrats échus avant le 12 mars 2020.
Des mécanises dérogatoires sont mis en place pour tenir compte des difficultés d’exécution suscitées par l’épidémie.
- Clause sanctionnant une inexécution (art. 4) : les effets des astreintes et de certaines clauses contractuelles (clauses résolutoires, clauses pénales et clauses de déchéance) venant sanctionner l’inexécution du débiteur sont paralysées.
L’ordonnance du 25 mars 2020 a prévu un report forfaitaire (c’est-à-dire d’une durée égale à la période juridiquement protégée, plus un mois) des astreintes, clauses pénales, clauses résolutoires et aussi pour les clauses prévoyant une déchéance, lorsqu’elles ont pour effet de sanctionner l’inexécution d’une obligation dans un délai déterminé.
L’ordonnance du 15 avril 2020 modifie et complète ce dispositif.
Tout d'abord, s’agissant des clauses et des astreintes qui sanctionnent l’inexécution d’une obligation échue pendant la période juridiquement protégée, la date à laquelle ces clauses et astreintes prendront leur cours ou leur effet est modifiée. Le report n’est plus forfaitairement fixé à un mois, comme initialement prévu, mais glissant : il sera égal à la durée d’exécution du contrat qui a été impactée par les mesures résultant de l’état d’urgence sanitaire.
Pour les baux d’habitation, en cas d’impayé de loyer et de charges, cette mesure permet de reporter les effets de la clause résolutoire (2 mois après le commandement de payer) d’une durée qui sera calculée à la fin de la période juridique protégée. Ce report sera égal à la durée d'exécution du bail impactée par les mesures résultant de l'état d'urgence sanitaire.
Ensuite, il est ajouté un dispositif de report du cours des astreintes et de la prise d’effet des clauses pénales, résolutoires et de déchéance lorsque celles-ci sanctionnent l’inexécution d’une obligation autre que de somme d’argent (par exemple, en matière de baux d’habitation, les clauses sanctionnant un défaut d’assurance), prévue à une date postérieure à la fin de la période juridiquement protégée.
Ce report sera également calculé, après la fin de la période juridiquement protégée, en fonction de la durée d’exécution du contrat qui a été impactée par les contraintes du confinement.
Les clauses et astreintes sanctionnant les obligations de sommes d’argent sont exclues de ce second dispositif applicable aux échéances postérieures à la fin de la période juridiquement protégée. Le rapport du 15 avril 2020 précise que "en effet, l’incidence des mesures résultant de l’état d’urgence sanitaire sur la possibilité d’exécution des obligations de somme d’argent n’est qu’indirecte et, passé la période juridiquement protégée, les difficultés financières des débiteurs ont vocation à être prises en compte par les règles de droit commun (délais de grâce, procédure collective, surendettement)".
Aménagement conventionnel : les parties au contrat peuvent écarter l’application de ces mesures, par des clauses expresses, notamment si elles décident de prendre en compte différemment l’impact de la crise sanitaire sur les conditions d’exécution du contrat. Elles peuvent également décider de renoncer à se prévaloir de ces dispositions.
- Délai pour résilier ou dénoncer une convention en cours (art. 5) : lorsqu’une convention ne peut être résiliée que durant une période déterminée ou qu’elle est renouvelée en l’absence de dénonciation dans un délai déterminé, cette période ou ce délai sont prolongés de deux mois s’ils expirent pendant la période juridiquement protégée.
Adaptation des procédures en matière administrative (titre II)
Le second titre de l’ordonnance adapte certains délais et procédures administratifs.
Personnes publiques concernées (art. 6)
Une conception extensive de la notion d'autorité administrative est retenue (cf. rapport). Sont visés les administrations de l'État, les collectivités territoriales, les établissements publics administratifs, les organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d'une mission de service public administratif, y compris les organismes de sécurité sociale.
Suspension des délais de l’action administrative (art. 7)
Lorsqu’une décision, un accord ou un avis d’une autorité administrative peut ou doit intervenir ou est acquis implicitement à l’issue de délais qui n’ont pas expirés avant le 12 mars 2020, ces délais sont, à cette date, suspendus pendant la période juridiquement protégée.
Cette suspension s’applique sous réserve des obligations découlant d’un engagement international ou du droit de l’Union européenne.
Lorsque les délais de même nature auraient dû commencer à courir pendant cette même période, leurs points de départ sont reportés.
Ces règles s’appliquent également aux délais impartis aux autorités administratives pour vérifier le caractère complet d’un dossier, pour demander des pièces complémentaires lors de l’instruction d’une demande ainsi qu’aux délais prévus pour la consultation ou la participation du public.
Suspension des délais : réalisation de contrôles, travaux ou mises en conformité (art. 8 et 9 / décret n° 2020-607 du 20.5.20 : JO du 21.5.20)
Lorsqu'ils n'ont pas expiré avant le 12 mars 2020, les délais imposés par l'administration à toute personne pour réaliser des contrôles, des travaux ou pour se conformer à des prescriptions sont, à cette date, suspendus jusqu'à la fin de la période juridiquement protégée.
Cette suspension ne s’applique pas aux délais résultant d'une décision de justice.
Lorsque les délais de même nature auraient dû commencer à courir entre le 12 mars 2020 et la fin de la période juridiquement protégée, à savoir le 23 juin 2020 inclus, leurs points de départ sont reportés à l’achèvement de cette période.
Par dérogation, un décret pourra fixer des catégories d'actes, de procédures et d'obligations pour lesquels, pour des motifs de protection des intérêts fondamentaux de la Nation, de sécurité, de protection de la santé, de la salubrité publique, de préservation de l'environnement et de protection de l'enfance et de la jeunesse, le cours des délais devra reprendre.
Pour les mêmes motifs, un décret pourra, pour un acte, une procédure ou une obligation, fixer une date de reprise du délai, à condition d'en informer les personnes concernées.
Cette mesure est complétée par l’ordonnance du 15 avril 2020, qui apporte des précisions sur la suspension de ces délais qui s’applique pendant la période du 12 mars 2020 et jusqu' au 23 juin inclus. Ainsi, l’autorité administrative peut modifier ces obligations ou y mettre fin, ou, lorsque les intérêts dont elle a la charge le justifie, pour prescrire leur application ou en ordonner de nouvelles, dans le délai qu’elle détermine.
Cet article souligne en outre que, dans la détermination des obligations ou des délais à respecter, l’autorité administrative devra tenir compte dans tous les cas, des contraintes liées à l’état d’urgence sanitaire.
Lutte contre l’habitat indigne : le décret du 20 mai 2020, dont l’entrée en vigueur est fixée au 29 mai 2020, a pour objet de fixer des dérogations à la suspension des délais de certaines catégories d'actes, de procédures ou d'obligations en matière d'habitat indigne.
Il prévoit que certains délais prévus par plusieurs arrêtés de police administrative contre l'habitat indigne, reprennent leur cours, au vu des enjeux pour la santé, la sécurité et la salubrité publique.
Il s’agit :
- des délais prévus par les arrêtés de police administrative suivants :
- arrêtés relatifs à l’urgence, notamment en cas de danger ponctuel imminent (CSP : L.1311-4), à la suroccupation (CSP : L.1331-23) et au danger imminent en insalubrité (CSP : L.1331-26-1) ;
- arrêtés pris en cas de risque d’exposition au plomb (CSP : L.1334-1) et comportant une interdiction d'habiter ou d'occuper les lieux ;
- arrêtés pris en cas de risques pour la sécurité des équipements communs des immeubles collectifs d’habitation (CCH : L.129-3) et de péril imminent (CCH :L.511-3) ;
arrêtés relatifs à la sécurité des établissements recevant du public (CCH : L.123-3) et au péril (CCH : L.511-1), uniquement en ce qui concerne les délais prévus pour :- faire cesser ou interdire l'usage d'habitation ou l'utilisation ;
- assurer le relogement ou l'hébergement des occupants ;
- exécuter toute autre prescription rendue indispensable par la gravité du danger encouru par les occupants ou les tiers, notamment en raison du confinement ;
- des délais prévus par les arrêtés pris par les maires en cas de danger grave ou imminent (CGCT : L.2212-4).
Fiscalité : suspension des délais de l’administration (art. 10)
Cet article prévoit une suspension de certains délais jusqu’au 23 août 2020 (ord. 11.5.20 : art. 1, 4° a). Cela concerne notamment les délais accordés à l'administration pour réparer les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette de l'impôt, les insuffisances, les inexactitudes ou les erreurs d'imposition et appliquer les intérêts de retard et les sanctions (LPF : L.168 à L.189) / Code des douanes : art. 354) lorsque la prescription est acquise au 31 décembre 2020.
La suspension des délais concerne également ceux applicables en matière de rescrit.
Le report des formalités déclaratives ne s'applique pas aux déclarations servant à l'imposition et à l'assiette, à la liquidation et au recouvrement des impôts droits et taxes. Il s'agit ici de préserver le recouvrement des recettes publiques nécessaires au fonctionnement des services publics et au soutien de l'économie (cf. rapport).
Recouvrement et contestation des créances publiques (art. 11)
Les délais applicables en matière de recouvrement et de contestation des créances publiques prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité ou déchéance d'un droit ou d'une action sont suspendus jusqu’au 23 août 2020. Ces dispositions concernent l'ensemble des créances dont le recouvrement incombe aux comptables publics.
Enquêtes publiques et délais applicables en matière d’urbanisme et d’aménagement (titre II bis)
L’ordonnance du 15 avril 2020 (art. 8) crée, au sein de l’ordonnance du 25 mars 2020, un nouveau titre II bis, dédié aux enquêtes publiques et aux procédures en matière d’urbanisme et d’aménagement.
Ce texte prévoyait une suspension de certains délais d’urbanisme pendant l’état d’urgence sanitaire qui initialement prenait fin le 23 mai 2020, mais qui est prorogé jusqu’au 10 juillet 2020 par la loi du 11 mai 2020.
Enfin, l’ordonnance du 7 mai 2020 maintient le terme initial de la fin de la période de suspension des instructions et des recours, à savoir le 23 mai 2020. Cette période de suspension est désormais dissociée de la période d’état d’urgence sanitaire.
Enquête publique en cours ou devant être organisée pendant l’état d’urgence sanitaire
(art. 12)
À compter du 12 mars 2020 et jusqu’au 30 juin 2020, les procédures d'enquête publique relatives à des projets présentant tout à la fois un intérêt national et un caractère d'urgence peuvent être aménagées. L'autorité compétente pour organiser l'enquête peut, pour toute enquête publique déjà ouverte relative à un tel projet, décider qu'elle se poursuit uniquement par des moyens électroniques dématérialisés.
Toute nouvelle enquête publique relative à un tel projet sera ouverte et conduite uniquement par des moyens électroniques dématérialisés. Si la durée de l'enquête publique court au-delà du 30 mai 2020 l'autorité qui l'organise peut choisir de l'achever selon les mêmes modalités dématérialisées ou de l'achever selon les modalités de droit commun.
Délais de recours (art. 12 bis)
L'ordonnance du 25 mars 2020 (art. 2) précisait que les tiers pouvaient exercer un recours pendant une durée de deux mois à compter de la période juridiquement protégée (soit initialement jusqu’au 24.8.20).
Les règles applicables aux délais de recours et aux déférés préfectoraux ont été modifiées par l’ordonnance du 15 avril 2020. Cela s’applique aux décisions de non-opposition à une déclaration préalable et aux permis de construire, d’aménager ou de démolir.
Les délais de recours et de déférés préfectoraux à l’encontre de ces décisions d’urbanisme qui n’ont pas expirés avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus. Ils reprendront leur cours à compter du 24 mai 2020 et pour la durée restante à courir, sans que cette durée ne puisse être inférieure à sept jours.
Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 sont également reportés à la date d’achèvement de celle-ci.
Par exemple, le délai de recours contentieux contre un permis de construire est de deux mois à compter du premier jour d’affichage de l’autorisation sur le terrain. Au-delà, hors période d’état d’urgence sanitaire, le recours serait irrecevable. En période d’état d’urgence sanitaire, si un délai de recours contre un permis de construire devait expirer le 26 mars, il sera suspendu à partir du 12 mars 2020 et reprendra son cours à partir du 24 mai 2020 pour sa durée restant à courir.
Délais d’instruction (art. 12 ter)
Les délais d’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme, des certificats d’urbanisme ainsi que des procédures de récolement, qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020, sont, à cette date, suspendus. Ils reprennent leur cours à compter du 24 mai 2020. Les délais qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 sont reportés à la fin de celui-ci. Ces mêmes règles s’appliquent aux délais impartis aux collectivités territoriales, leurs établissements publics, aux services, autorités ou commissions, pour émettre un avis ou donner un accord dans le cadre de l’instruction de ces demandes.
L’ordonnance du 7 mai 2020 applique également ces dispositions au délai dans lequel une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou une autorisation d'urbanisme tacite ou explicite peut être retirée (CU : L.424-5).
Pour mémoire, pendant cette période de crise sanitaire, les règles applicables au délai de retrait d’une autorisation d’urbanisme par l’administration, étaient jusqu’ici régies par l’article 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020.
Procédures de préemption (art. 12 quater)
Les délais impartis pour répondre à une déclaration d’intention d’aliéner, qui ont commencés à courir avant le 12 mars 2020, sont suspendus. Le nouvel article 12 quater modifiée par l’ordonnance du 7 mai 2020 dispose qu’ils recommenceront à courir à compter du 24 mai 2020 pour leur durée restante. Ceux qui auraient dû commencer à courir pendant la période du 12 mars 2020 au 23 mai 2020 sont reportés à son achèvement.
Organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (art. 12 quinquies)
Le cours des délais reprend pour les participations du public par voie électronique aux décisions ayant un impact sur l’environnement et relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
L’ordonnance du 13 mai 2020 précise qu’à compter du 24 mai 2020, reprennent leur cours les délais relatifs aux avis, actes et procédures qui permettent la réalisation d’opérations d’aménagement, d’ouvrages, de projets immobiliers nécessaires à la préparation, à l’organisation ou au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Dispense de consultation préalable (art. 13)
Sous réserve des obligations résultant du droit international et du droit de l'Union européenne, les projets de texte réglementaire ayant directement pour objet de prévenir les conséquences de la propagation du covid-19 ou de répondre à des situations résultant de l'état d'urgence sanitaire sont dispensés de toute consultation préalable obligatoire prévue par une disposition législative ou réglementaire, à l'exception de celles du Conseil d’État et des autorités saisies pour avis conforme.
Prolongation de droits sociaux
(ordonnance n° 2020-312 relative à la prolongation de droits sociaux et rapport du 25.3.20 / ordonnance n° 2020-460 et rapport du 23.4.20)
Face aux conséquences de l'épidémie de covid-19, afin d'assurer la continuité de l'accompagnement et la protection des personnes en situation de handicap et des personnes en situation de pauvreté, les ordonnances prévoient, notamment :
- une prolongation de certains droits et prestations sociales liés au handicap (notamment l’Allocation adulte handicapé (AAH), l’Allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH), carte mobilité inclusion), dont l’accord expire entre le 12 mars et le 31 juillet 2020 ou a expiré avant le 12 mars, mais n'a pas encore été renouvelé à cette date ;
- la prorogation, à la demande du parent, du bénéfice de l’Allocation journalière de présence parentale (AJPP) pour une durée de 3 mois lorsque le traitement de l’enfant justifiant le bénéfice de l’allocation se poursuit en l’absence de renouvellement du certificat médical le prévoyant ;
- un allègement des conditions de recevabilité des demandes déposées auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) afin d'assurer le maintien des droits et prestations attribués aux personnes en situation de handicap ;
- le versement d'avances sur droits supposés aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) dès lors qu'elles sont dans l'incapacité de procéder au réexamen des droits à ces prestations du fait de la non transmission d'une pièce justificative ou de la déclaration trimestrielle de ressources par les Caisses d'allocations familiales (CAF), de Mutualité sociale agricole (MSA) et la caisse gestionnaire du régime des prestations familiales à Mayotte procèdent à des versements.
Adaptations des règles d'organisation et de fonctionnement des établissements sociaux et médico-sociaux pour faire face à l'épidémie de covid-19
(ordonnance n° 2020-313 relative aux adaptations des règles d'organisation et de fonctionnement des établissements sociaux et médico-sociaux et rapport du 25.3.20)
Pour faire face aux conséquences de l'épidémie de covid-19 et assurer la continuité de l'accompagnement et la protection des personnes âgées, des personnes en situation de handicap, des majeurs et mineurs protégés et des personnes en situation de pauvreté, les conditions d'autorisation, de fonctionnement et de financement des établissements sociaux et médico-sociaux sont assouplies. Le texte vise à permettre l'accompagnement en urgence de ces publics, de manière temporaire en relais du domicile ou à domicile. Il vise également à fluidifier les capacités de réponses à apporter en permettant de diversifier les publics accompagnés en situation d'urgence.
Prolongation de la durée de validité des documents de séjour
(ordonnance n° 2020-328 portant prolongation de la durée de validité des documents de séjour et rapport du 25.3.20 /ordonnance n° 2020-460 et rapport du 23.4.20)
La durée de validité des documents de séjour (visas de long séjour, titres de séjour, autorisations provisoires de séjour, récépissés de demande de titre de séjour et attestations de demande d'asile) est prolongée pour une durée de 6 mois (avant l’ordonnance du 22 avril 2020, la prolongation avait été fixée à 3 mois), afin de sécuriser la situation des étrangers dont le titre de séjour devrait arriver à expiration dans les prochains jours ou dans les prochaines semaines et d'éviter, ainsi, les ruptures de droits.
Ainsi, elle permet aux étrangers concernés de se maintenir régulièrement sur le territoire après la fin de validité de leur titre de séjour et pour une période de 6 mois (avant l’ordonnance du 22 avril 2020, la prolongation avait été fixée à 3 mois), en attendant que la demande de renouvellement de leur titre puisse être instruite par les préfets.
Contrats publics
(ordonnance n° 2020-319 portant diverses mesures d'adaptation des règles de passation, de procédure ou d'exécution des contrats soumis au Code de la commande publique et des contrats publics qui n'en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19 et rapport du 25.3.20 / ordonnance n° 2020-460 et rapport du 23.4.20 / ordonnance n° 2020-560 du 13.5.20 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d’urgence sanitaire)
Afin de pallier les difficultés susceptibles d'être rencontrées par les opérateurs économiques dans l'exécution des marchés et des concessions et éviter les ruptures d'approvisionnement pour les acheteurs, les contrats dont la durée d'exécution arrive à échéance pendant l’état d’urgence sanitaire peuvent être prolongés au-delà de la durée maximale fixée par le Code de la commande publique et les autorités contractantes sont autorisées à s'approvisionner auprès de tiers nonobstant d'éventuelles clauses d'exclusivité.
Afin de ne pas pénaliser les opérateurs économiques qui sont empêchés d'honorer leurs engagements contractuels du fait de l'épidémie, des mesures sont prises pour faire obstacle aux clauses contractuelles relatives aux sanctions pouvant être infligées au titulaire et prévoir les modalités de son indemnisation en cas de résiliation du contrat ou d'annulation de bons de commande.
Par ailleurs, le versement des redevances d’occupation domaniale peut être suspendu lorsque les conditions d’exploitation de l’occupant sont très dégradées.
L'application de ces dispositions requiert une analyse au cas par cas de la situation dans laquelle se trouvent les cocontractants qui devront justifier la nécessité d'y recourir.
Ces dispositions s’appliquent aux contrats en cours ou conclus durant la période courant du 12 mars 2020 jusqu'au 23 juillet 2020 inclus.
Enfin, les règles d'exécution financières des contrats de la commande publique sont assouplies, notamment en permettant aux acheteurs de verser des avances d'un montant supérieur au taux maximal de 60 % prévu par le Code de la commande publique. Cette possibilité peut se poursuivre pendant un délai de deux mois suivant la fin de la prorogation de l'état d'urgence sanitaire.
Mesures de continuité budgétaire, financière et fiscale des collectivités territoriales
(ordonnance n° 2020-330 relative aux mesures de continuité budgétaire, financière et fiscale des collectivités territoriales et des établissements publics locaux afin de faire face aux conséquences de l'épidémie de covid-19 et rapport du 25.3.20 / ordonnance n° 2020-460 et rapport du 23.4.20)
Les règles d’adoption des budgets et des taux de fiscalité sont assouplies. Les pouvoirs des exécutifs locaux sont étendus pour engager, liquider et mandater des dépenses pour les collectivités n’ayant pas adopté leur budget primitif.
Ainsi, le président du conseil régional peut octroyer directement des aides aux entreprises, par délégation du conseil régional, pour une durée maximale de six mois dans la limite de 100 000 euros.
Cette délégation permet au président de prendre les mesures sans avoir à réunir son assemblée délibérante. Il devra toutefois rendre compte des aides octroyées lors de la prochaine réunion du conseil régional.
En matière budgétaire, plusieurs échéances légales sont reportées :
- l’adoption du budget primitif au titre de l’exercice 2020 est repoussée au 31 juillet 2020 contre le 15 ou le 30 avril 2020 ;
- la date limite de l’arrêt du compte administratif 2019 est fixée au 31 juillet 2020 contre le 30 juin 2020 ;
- les délais relatifs à la présentation du rapport d’orientation budgétaire et à la tenue débat d’orientation budgétaire sont suspendus. Ils pourront intervenir lors de la séance consacrée à l’adoption du budget primitif.
En matière fiscale, les décisions relatives aux tarifs et aux taux des impositions locales sont retardées :
- la date limite du vote des taux et tarif des impôts locaux par les collectivités territoriales (Taxe foncière sur les propriétés bâties - TFPB, Taxe foncière sur les propriétés non bâties - TFPNB, Taxe d’enlèvement des ordures ménagères - TEOM, taxe GEMAPI...) est reportée au 3 juillet 2020. En l’absence de délibération, les taux et tarifs 2019 pourront être prorogés ;
- l’adoption du coefficient de la Taxe locale sur la consommation finale d’électricité (TCFE) est repoussée au 1er octobre 2020 ;
- la date limite pour instituer et fixer les tarifs de la taxe locale sur la publicité extérieure est prolongée de quatre mois, soit jusqu’ au 1er octobre 2020 ;
- la date d’institution de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères par les syndicats mixtes compétents a été repoussée au 1er septembre 2020 ;
- le taux adopté par les départements avant le 3 juillet 2020 en matière de droit d’enregistrement et de taxe de publicité foncière entrera en vigueur le 1er septembre 2020.
Certaines mesures budgétaires plus souples ont en outre été prévues en cas de non-adoption du budget primitif des collectivités territoriales :
- en l'absence d'adoption du budget de l'exercice 2020, les collectivités territoriales, leurs établissements et les EPCI pourront continuer à engager, liquider et mandater les dépenses d’investissement dans la limite des dépenses inscrites dans le budget précédent ;
- concernant les dépenses imprévues, le plafond sera porté à 15 % des dépenses prévisionnelles de chaque section. Il est habituellement de 7,5 % ou 2 % ;
- les mouvements de crédits de chapitre à chapitre seront facilités sur décision de l’exécutif, dans la limite de 15 % des dépenses de chaque section. Ils seront également possibles pour l'ensemble des collectivités, de leurs établissements publics et EPCI avant le vote du budget ;
- les délégations en matière d’emprunt ayant pris fin en 2020 sont rétablies et restent valables jusqu'à la première réunion du conseil municipal ou de l'organe délibérant suivant cette entrée en vigueur.
L’ordonnance prolonge le mandat des représentants des élus locaux au comité des finances locales jusqu’au premier jour du cinquième mois suivant le second tour du renouvellement des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon organisé en 2020.
L’ordonnance du 22 avril 2020 permet en outre le versement d’avances aux syndicats qui ont décidé de lever une part additionnelle de fiscalité à certaines impositions en 2019 avant le vote de leur budget 2020 et avant l'expiration du délai de consultation des communes membres. Ces impositions correspondent à la taxe foncière sur les propriétés bâties et les propriétés non bâties, la taxe d'habitation et la cotisation foncière des entreprises. Ces avances mensuelles représentent un douzième du montant total de ces impositions voté dans leur budget pour l'exercice 2019.
Par ailleurs, l’ordonnance prévoit un mécanisme de reversement des avances de fiscalité dans l'hypothèse où les syndicats décideraient, a posteriori, lors du vote de leur budget 2020, de ne plus percevoir de contributions fiscalisées ou que les avances versées excéderaient le montant des impositions prévu dans le budget voté pour l'exercice 2020.
Mesures spécifiques pour les entreprises
Locaux professionnels et commerciaux : report de paiement
(ordonnance n° 2020-316 relative au paiement des loyers, des factures d'eau, de gaz et d'électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises dont l'activité est affectée par la propagation de l'épidémie de covid-19 et rapport du 25.3.20 / décret n° 2020-371 du 30.3.20 : JO du 1.4.20)
L’ordonnance prévoit le report intégral ou l’étalement des loyers, des factures d'eau, de gaz et d'électricité pour les locaux professionnels et commerciaux des microentreprises (au sens du décret n° 2008-1354 du 18.12.08), dont l'activité est affectée par la propagation de l'épidémie.
Le décret du 30 mars 2020 précise les bénéficiaires de cette mesure et précise également les catégories d'entreprises qui ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d'astreinte, d'exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d'activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux.
Création d’un fonds de solidarité pour les entreprises
(ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d'un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation et rapport du 25.3.20 / décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 : JO du 31.3.20 / décret n° 2020-433 du 16.4.20 : JO du 17.4.20 / ordonnance n° 2020-460 et rapport du 23.4.20 / décret n° 2020-552 du 12.5.20 : JO du 13.5.20)
L'ordonnance du 25 mars 2020 met en place un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter sa propagation. Ce dispositif de solidarité complète les dispositifs comme l’activité partielle, l'octroi de délais de paiement des charges fiscales et sociales ou les remises d'impôts.
Un fonds est ainsi créé pour une durée de trois mois prolongeable pour la même durée. Il reçoit le versement d'aides financières aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation.
Ce fonds sera financé par l'État et, sur la base du volontariat, par les régions, les collectivités d’outre-mer, la Nouvelle-Calédonie et toute autre collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.
Le décret du 30 mars 2020 (modifié par les décrets du 16.4.20 et du 12.5.20) organise le fonctionnement de ce fonds.
L’ordonnance du 22 avril 2020 précise les caractéristiques de l’aide et les modalités de son contrôle.
Prolongation de l’état d’urgence sanitaire en Guyane et à Mayotte
(loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire : JO du 10.7.20)
La loi du 9 juillet 2020 prolonge l’état d’urgence sanitaire en Guyane et à Mayotte jusqu’au 30 octobre 2020 inclus. En outre, elle habilite le premier ministre à prendre par décret des mesures liées à la circulation des personnes et des véhicules, à l’ouverture des établissements recevant du public, à la règlementation des rassemblements de personnes sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public.